Le microbe n’est rien, le terrain est tout. Dans Néosanté, nous reprenons souvent cette formule de Claude Bernard pour brocarder la mythologie pasteurienne et dénoncer l’illusion qui consiste à considérer les germes comme des ennemis du genre humain. Et nous avons maintes fois souligné à quel point la nature était bien faite : plus un virus est transmissible, moins il représente une menace ; moins il est contagieux, plus il peut être dangereux. Normal puisque l’objectif biologique des virus est aussi de se perpétuer et que faire mourir un grand nombre d’hôtes potentiels n’est pas vraiment une solution gagnante. En 2009, il suffisait de considérer la grande contagiosité de la grippe A-HIN1 pour prédire qu’elle serait parfaitement inoffensive, ce qui s’est évidemment vérifié.
Pour nous contredire, on nous objecte souvent la « grande épidémie de grippe espagnole » qui a fait des dizaines de millions de morts entre 1918 et 1919 : visiblement, ce virus très pathogène passait très facilement d’un organisme à l’autre. Mais à travers plusieurs articles, notamment celui du Dr Van den Bogaert dans notre numéro de décembre (Néosanté N° 29), nous avons à notre tour corrigé cette vision des choses : si le virus a fait tellement de dégâts, c’est d’abord en raison du contexte de son émergence (quatre ans de boucherie et de gaz moutarde dans les tranchées) et ensuite du recours massif aux premiers antipyrétiques. Il est très éloquent que les homéopathes et naturopathes de l’époque, qui soignaient autrement et se gardaient bien de faire tomber la fièvre, enregistraient une beaucoup plus faible mortalité parmi leurs patients grippés. On ne peut pas le prouver, mais tout porte à croire que l’aspirine et les vaccinations - divers vaccins furent en effet inoculés aux soldats rentrant de la guerre – furent les vraies causes de la pire pandémie de l’Histoire moderne. Le microbe n’était presque rien, on en a fait un agent destructeur par ravage du terrain et par ignorance de sa mission réparatrice.
De nos jours, il n’y a pas lieu d’appréhender un scénario catastrophe. Comme toujours, les grippes très répandues sont très bénignes et celles qui se surmontent plus difficilement ne se transmettent pas facilement. Et nous sommes loin du contexte psycho-émotionnel de 1918, avec des millions de gens traumatisées par un conflit de territoire long et intense. Ce qui est légèrement inquiétant, c’est que les virus grippaux prennent aujourd’hui naissance dans des élevages industriels concentrationnaires et que ces germes inédits voyagent beaucoup plus rapidement que naguère. Au regard de la médecine nouvelle du Dr Hamer, il n’est pas exclu que ces modifications écologiques puissent s’avérer problématiques. Dans ses ouvrages, le médecin allemand explique qu’un être humain s’adapte à l’écosystème microbien au rythme ancestral de son déplacement pédestre, soit environ 5 Km/h. Le fait que des microbes mutants débarquent brutalement par avion n’est pas très rassurant. Et le fait qu’ils se combinent dans les organismes d’animaux martyrisés et chimiquement drogués pourrait représenter un certain danger pour des individus surmédicalisés et au système immunitaire défaillant (ceci expliquant partiellement cela). Ce péril hypothétique n’est pourtant pas de nature à soulever la panique : comme les épisodes du SRAS et de la grippe aviaire H5N1 l’ont déjà montré, la logique naturelle de la contagiosité inversement proportionnelle à la dangerosité semble toujours en vigueur.
Mais comme nous l’avons déjà écrit aussi, il en va tout autrement des chimères microbiennes produites en laboratoire. Il y a deux ans, on apprenait que des chercheurs hollandais avaient mis à exécution le projet insensé de « fusionner » le virus H1N1 avec le H5N1, juste pour démontrer que le virus bénin pouvait acquérir les caractéristiques de l’ennemi mortel, et bien sûr nous concocter le vaccin qui viendrait providentiellement nous préserver du fléau. Dernièrement, c’est à l’Université du Wisconsin que d’autres savant fous se sont mis en vedette : ils ont développé un virus terriblement mortel (du moins chez l’animal, en l’occurrence le furet) en bricolant les gènes de celui de la grippe aviaire actuelle pour y introduire des ingrédients génétiques repérés dans le virus de la grippe espagnole. Heureusement, ces apprentis-sorciers américains ont partiellement échoué et leur virus transgénique est toujours incapable se transmettre entre mammifères par voie aérienne. La logique écologique résiste. Mais en sera-t-il toujours ainsi ? Et que se passerait-il si le germe artificiel s’échappait - fortuitement ou volontairement (bioterrorisme) - du laboratoire ? Selon le virologue belge Patrick Goubeau interviewé dans le journal Le Soir , cela s’est déjà produit avec un souche du H1N1 apparue en 1957, remplacée spontanément par une nouvelle variante baptisée H2N2, puis réapparue subitement en 1978, très probablement après des expériences non confinées. Ici, ce serait encore plus affolant puisqu’il s’agit de ramener à la vie le virus de 1918. Moi, je ne mettrais pas ma main au feu que ce microorganisme réveillé par l’Homme serait aussi peu dangereux que son ancêtre injustement accusé de la pandémie dévastatrice. En voyageant dans l’espace plus vite que la nature, les virus sont déjà moins inoffensifs qu’autrefois. En voyageant dans le temps, ils bouleverseraient carrément l’équilibre du microcosme, et très probablement à notre détriment. C’est là, dans une technoscience sans conscience, que réside le grand péril viral. Le jour où il adviendrait, le virus serait peut-être tout et le terrain ne serait plus rien. Et Pasteur de triompher dans sa tombe grâce aux cinglés ayant joué avec la « vie qui ruse » comme à la roulette russe.
Yves Rasir
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