LA BOULIMIE & L’OBÉSITÉ (II) Un syndrome du tigre ?

Selon le cours sur les Problèmes de nutrition, obésité, maigreur, surpoids, boulimie et anorexie de Bertrand Lemieux , la boulimie peut être un risque mortel de manquer de nourriture, proche du conflit d’abandon ou de sevrage raté et disharmonieux. Manquer de l’essentiel pousse à se se jeter sur l’aliment vital, à manger avant qu’il en manque. Avec ces informations, il m’apparait évident que le manque de nourriture sporadique est une condition propice à un développement d’un comportement alimentaire similaire à celui du tigre, c’est-à-dire aux pulsions boulimiques ou à la boulimie. On peut aussi dire que le manque de nourriture affective est une condition propice à l’éclosion d’une boulimie. Le manque d’amour des parents, une présence discontinue de la mère ou la séparation des parents, la situation dans une famille monoparentale, le gardiennage trop fréquent, sont toutes des situations qui peuvent être interprétées par l’enfant comme un manque vital de nourriture.

Manque d’amour

Un autre des concepts de base en biologie totale est que le conflit psychologique des parents devient le conflit biologique de l’enfant. Je reviens à mon problème de départ : mon fils et son surpoids (Voir Néosanté N° 38). En quoi mon enfant résout-il biologiquement mon conflit psychologique ? En d’autres mots, quel est mon conflit psychologique qui cause le surpoids de mon fils?
Mon fils me reproche de n’avoir rien à manger. Il prétend que la nourriture disponible est inadéquate. Il n’est pas rare de le voir se gaver quand il aime son repas. Il dit avoir toujours faim. Il a peur de trop manger. Il est souvent « agressif » dans ses demandes. Il est insatiable. Il a tous les symptômes d’un comportement boulimique. Et si je m’observe, il n’est pas rare que j’aie moi aussi des rages de nourriture, des pulsions boulimiques. J’ai vraiment l’impression de combler un vide affectif. Et manger me donne un sentiment d’apaisement. Mon corps physique n’a pas besoin de manger, mon corps émotionnel oui.
Je trouve en effet laborieux d’assumer la tâche de nourrir mon enfant jour après jour. J’angoisse à l’idée de faire les repas et de le voir rechigner sur ce que je fais. Je me sens « obsessive » à vouloir combler systématiquement tous ses besoins de façon générale, avant même qu’il ne les exprime. Je me sens comme une esclave aux services de ses besoins. Je me sens prisonnière de mon rôle de mère et je me sens coupable d’être comme ça. Je prends conscience que je donne à mon enfant ce que j’aurais voulu recevoir pour combler ma demande d’amour sans fond. Mon fils me montre tous les signes de la personnalité dépendante décrite précédemment et me montre ainsi mon conflit psychologique.

L’éducation des petits tigres

À ce stade de mes observations, j’ai eu l’idée d’explorer le comportement de la tigresse envers ses petits. Je découvre que la tigresse élève seul son petit (la mère est monoparentale). Elle pousse le père très vite hors du nid puisqu’il constitue une menace. Le tigre peut en effet tenter de dévorer ses propres petits. Il existe un lien affectif très fort entre la tigresse et ses bébés. Elle les surprotège, c’est un comportement vital pour leur survie. Elle doit les surveiller assidûment car beaucoup de prédateurs n’attendent que l’opportunité de les manger. C’est une mère qui défend courageusement ses petits. Les jeunes tigres demeurent avec leur mère autour de deux ans. Pendant leur croissance, elle n’admet aucun intrus près du nid. Elle tue l’ennemi qui s’approche de trop près. Quand la chasse a été bonne, elle conduit sa progéniture auprès de la carcasse et y reste jusqu’à ce que tout soit mangé. Lorsque que les tigreaux sont plus âgés, la tigresse les amène avec elle à la chasse. Ceux-ci nuisent souvent à ses tentatives d’attaque. Cependant, une fois la proie bien morte, elle laisse les jeunes se rassasier avant de se nourrir elle-même.
Je suis « une vraie tigresse »! Oui, je protège mes enfants du danger potentiel venant du père. Ayant été élevée par un père extrêmement autoritaire, le respect de mes besoins fondamentaux ont été régulièrement bafoués. Je dois donc m’assurer que le père ne constitue pas une menace. Je donne à mes enfants ce qui m’a manqué… mais est-ce trop ? Comme la tigresse, je leur apporte la nourriture, même si ils sont en âge de se débrouiller Je les nourris, dans tous les sens du mot, avant de me nourrir moi-même (en d’autres mots je m’oublie, continuant ainsi à nourrir mes propres manques) . En allant de manière systématique au devant des besoins de mes enfants, sans qu’ils ne le demandent, j’ai créé aussi des enfants dépendants. Ils n’ont pas appris à demander (ils prennent, exigent ou attendent que cela leur tombe du ciel). Ils n’ont pas appris la patience, ils n’ont pas appris à être responsables, à prendre des décisions et à passer à l’action. Passer à l’action est pratiquement impossible pour eux puisqu’ils attendent que les autres les prennent en charge, sans aucun effort de leur part. Je les ai empêchés de trouver leurs propres valeurs. Donc, ils n’ont pas appris à être conscients de leurs besoins et de faire confiance en leur propre jugement.

Toutes des tigresses ?

Maintenant, je comprends que le manque affectif immense engendre des pulsions alimentaires, ou pire de la boulimie qui est en fait une demande insatiable d’amour. Je comble alors mon manque affectif en engendrant des enfants dépendants de moi. Un cercle vicieux chargé d’une grande souffrance émotionnelle. J’en conclus que mon enfant résout, par son surplus de poids, mes énormes difficultés à me faire entendre, à me faire comprendre, à mon manque d’affection, à ma peur viscérale d’oser demander, à ma peur de blesser, ma peur de ne pas être aimée, à la croyance de n’être pas grande chose, à ma blessure d’abandon. Le surplus de poids résout également biologiquement le besoin d’être vu et de prendre ma place. Les pulsions boulimiques et le surplus de poids qui en découle résolvent biologiquement l’incapacité à combler tous ses manques. Le corps fait ses réserves. N’est-ce pas de toute façon la fonction de la graisse dans notre corps?
Je constate que mon contexte particulier est vécu par beaucoup de mères dans notre société. Ce problème croissant de surpoids ne survient-il pas, aussi, dans une société qui nous dit que les enfants doivent être pris en charge fort longtemps ? Le temps de les former, le temps de leur apprendre à performer dans une société de plus en plus compétitive (les valeurs sociétales actuelles ne sont pas celles de la coopération). Ne sommes-nous pas toutes des tigresses qui ont peur de voir leurs rejetons dévorés s’ils n’ont pas acquis tous les atouts pour survivre?

Marie-Danelle Balthazard

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