envoyer à ses amis
ne plus recevoir d'emails de Néosanté -- recevoir les e-mails de Néosanté
si ce message n'apparait pas correctement, cliquez ici
pour répondre à cet email veuillez utiliser cette adresse : info@neosante.eu
Néosanté hebdo
mercredi 23 avril 2014

Je n’aime pas (trop) l’homéopathie

portrait de Yves RasirTant pis ! Je  sais que je vais encore me faire des ennemis et que je vais froisser nombre de mes amis, mais je pense utile et nécessaire de procéder à mon deuxième « coming out » (1) : je ne suis pas un chaud partisan de l’homéopathie….Je mets trois points de suspension car je devine que de nombreux lecteurs de cette infolettre ne sont pas sûrs d’avoir bien lu  et qu’ils se frottent les yeux avant de continuer leur lecture.  Je pense que beaucoup doivent être surpris et que la plupart sont même affligés de lire une telle déclaration.  Quoi,  le rédac’ chef de Néosanté, revue internationale de santé globale, n’est pas un avocat de l’homéopathie ?  Il confesse même son antipathie envers la reine des médecines des douces ?  Il n’est pas fan des hautes dilutions ni chantre de la loi de similitude ? Et bien oui, c’est comme ça : votre serviteur ne porte pas cette discipline dans son cœur.  

En fait, si, je la porte dans mon cœur.  J’ai beaucoup d’affinités avec cette approche de l’art de guérir, j’ai beaucoup d’estime pour ses praticiens et sans doute de nombreux points communs avec ses usagers. Ce n’est pas l’amour passion, mais  j’éprouve un  vrai sentiment de tendresse  envers l’homéopathie, et surtout envers ses acteurs.  Cependant,  la raison du cœur n’est pas la seule qui gouverne ma vie.  Il y a aussi la raison « raisonnante » qui est située dans le cerveau et qui n’a que faire des considérations affectives.  Il lui faut du raisonnement, de la logique et de la rigueur scientifique.  En d’autres termes, je pense avoir un cerveau droit assez ouvert, mais je ne ferme pas pour autant mon cerveau gauche. Je ne suis ni un rationaliste obtus, ni un rêveur crédule. Pour me  convaincre, il faut donc qu’une théorie m’apporte des preuves de sa validité.  Je veux bien tout croire, mais je dois, comme Saint-Thomas, mettre mon doigt dans les plaies avant de basculer dans la foi. Ce n’est pas le cas avec l’homéopathie.  Dans ce premier volet d’un édito à trois temps, je vais vous expliquer pourquoi la médecine hahnemannienne ne satisfait pas mon besoin de certitude. La semaine prochaine, je vous raconterai  les expériences personnelles sur lesquelles se fonde également mon scepticisme. Et enfin, je vous dirai pourquoi j’aime malgré tout l’homéopathie et lui reconnais un rôle majeur dans le changement du paradigme médical.

Place d’abord à la question qui fâche : l’action des remèdes homéopathiques est-elle scientifiquement démontrée ? A mes yeux, la réponse à cette question est clairement négative.  En 2005, le prestigieux journal The Lancet a publié une méta-analyse des études portant sur l’homéopathie et a conclu que son efficacité clinique n’allait pas au-delà de l’effet placebo.  Bien sûr, ce vaste travail a provoqué un tollé et suscité une tempête de critiques. Mais qui a fait la démonstration inverse sans qu’on puisse lui reprocher des failles méthodologiques ? Personne, à ma connaissance.  L’argument selon lequel les études analysées ne respectent pas le principe d’individualisation des traitements est certes pertinent, mais il ne doit pas conduire à mésestimer un fait :  lorsqu’elles sont conduites dans les règles de l’art, c’est-à-dire en double aveugle contre placebo, l’écrasante majorité des recherches conclut qu’une substance infinitésimale n’a pas d’action tangible sur l’organisme.  Tout récemment encore , une équipe australienne (2) a passé en revue la littérature scientifique pour évaluer l’efficacité des remèdes homéopathiques prescrits dans 68 situations pathologiques différentes (asthme, arthrite, rhume, grippe, eczéma, paludisme, brûlures, etc.). Pas moins de 343 études publiées entre 2007 et 2013 ont été passées au crible et les chercheurs en ont conservé 57 après avoir analysé la qualité des travaux. Verdict : l’homéopathie ne serait pas plus efficace qu’un placebo. Ce qui est assez inhabituel, c’est que les experts australiens laissent la porte ouverte à une modification de leurs conclusions : leur article n’est pas encore publié et les personnes qui voudraient en corriger la teneur ont jusqu’au 26 mai pour faire valoir leur point de vue. Sera-ce le  cas ? Je me permets d’en douter. Je ne suis pas journaliste médical mais depuis trois décennies, j’ai quand même un peu suivi l’actualité homéopathique.  Et je n’ai jamais eu vent d’une étude redorant avec éclat le blason de ce que ses adversaires qualifient de « pseudo science ».  Je me souviens notamment avoir suivi plusieurs conférences de presse triomphalistes des Laboratoires Boiron,  la multinationale monopolistique du granule qui consacre une fraction de ses plantureux bénéfices à essayer de fournir des preuves en faveur ses produits. Mais j’en suis toujours revenu déçu: soit il s‘agissait de banales études d’observation, soit carrément – ce qui revient  vraiment à se moquer du monde – de simples enquêtes de satisfaction. C’est un peu comme si on jugeait l’action présidentielle de François Hollande en interrogeant les seuls électeurs socialistes, à la différence notoire que ces derniers ne seraient même satisfaits. La république des sondages n’a rien à faire dans le débat scientifique !  Parmi les rares études cliniques concluantes, les moins critiquables  que j’ai eu à connaître présentaient tout de même une faille rédhibitoire, à savoir qu’elles comparaient l’action d’un remède homéo avec celle d’un médicament classique. Or, au risque de me répéter, ce n’est que l’essai contre placebo et en double insu (ni les patients ni les expérimentateurs ne savent ce qu’ils donnent ou reçoivent) qui peut permettre d’apporter des preuves. Et ces preuves implacables, jusqu’à… preuve du contraire, l’homéopathie n’en dispose pas encore.

A ce stade, je pressens déjà les réactions outrées :  on va m’envoyer des tas de références et de multiples liens vers des études scientifiques censées fournir de telles démonstrations. Mais avant de faire exploser ma boîte mail, chers internautes, je vous demande de bien  vérifier de quoi il s’agit : si vous épinglez les seules études  positives qui respectent la procédure en double aveugle contre placebo, le flux d’infos devrait être très fluet. Et par pitié, évitez-moi l’argument « bateau » selon lequel l’homéopathie « marche sur l’animal », ce que j’ai encore lu dernièrement dans un journal de médecine naturelle. Primo, je ne vois pas du tout pourquoi l’effet placebo serait anéanti par le fait qu’il s’agit d’animaux. Je pense au contraire que les relations entre l’Homme et ses amies les bêtes sont très subtiles, riches en mystères non encore élucidés, et certainement propices à un transfert d’influences invisibles. Secundo, les expériences  sur l’animal ont toujours le même défaut puisqu’elles ne comparent pas le produit homéopathique avec un faux médicament. La compétition l’oppose généralement au seul rival allopathique. Ce faisant, l’homéopathie militante nie la capacité d’autoguérison des êtres vivants et  la très grande puissance curative de la seule « nature guérisseuse », tellement admirée d’Hippocrate.  Je reviendrai là-dessus la semaine prochaine, car c’est très important.  

En attendant, je veux dissiper un éventuel malentendu : si je suis sceptique envers l’homéopathie, je le suis beaucoup moins à l’égard de ce que on appelle « la mémoire de l’eau », autrement dit la présence,  dans de l’eau pourtant épurée de toute particule de matière,  d’une « trace » électromagnétique de cette même matière. Mis à jour il y a un quart de siècle  par le célèbre et regretté Jacques Benveniste, ce phénomène étrange a été observé  depuis lors dans d’autres laboratoires. Même le magazine Science & Vie, d’habitude très hostile vis-à-vis de l’homéopathie,  s’en est déjà fait l’écho. Et  je ne pense pas que  le Prix Nobel de Médecine Luc Montagnier, qui s’intéresse à cette curieuse propriété de la molécule d’H2O de véhiculer des messages immatériels, soit tout à coup devenu fou. Je mettrais ma main au feu que l’eau n’a pas fini de nous étonner et que de prodigieuses découvertes « hydriques » défrayeront bientôt  la chronique scientifique. Du reste, il existe des études  réalisées « in vitro » et  montrant qu’un substrat hautement dilué peut impacter une culture de cellules.  C’est troublant et ça justifie d’accorder crédit  aux postulats initiaux de Samuel Hahnemman. Ce qui me paraît sujet à caution, c’est la prétention thérapeutique de son invention. Ce que je ne partage pas, c’est le dogme « alternatif » selon  lequel de petites boules de sucre dynamisées ont un effet avéré sur la santé de leurs consommateurs.  J’en fus un moi-même, mes enfants aussi, et je n’ai jamais rien remarqué de tel. Je me permettrai d’évoquer ce vécu personnel dans le Néosanté Hebdo de la semaine prochaine.

D’ici là, portez-vous bien, avec ou sans granules.

Yves Rasir

(1) J’ai procédé il y a quelque temps à mon premier « coming out » en faisant l’aveu que mes trois enfants n’avaient reçu aucun vaccin. Edito du mensuel Néosanté N° 23

(2)  Une présentation résumée de ce travail en cliquant ici 

Share on Google+

offre spéciale néosanté

disponible sur www.neosante.eu :
Le  numéro 33 (avril 2014) de Néosanté, revue internationale de santé globale.
couverture du numéro 33
S'abonner ? la version num?rique