Coucou, me revoilou. Avec une semaine de retard sur la date prévue mais c’était pour la bonne cause : mercredi dernier, j’étais en pleins préparatifs de la projection du film « La Loi, La Liberté »   dans mon village. Avec mes camarades covirésistants locaux, nous avons en effet organisé la venue du cinéaste Bernard Crutzen dans notre patelin et nous avons projeté son documentaire sur grand écran dans la salle des fêtes, séance suivie d’un temps d’échange avec le réalisateur. Ce fut une franche réussite car près de 120 personnes avaient répondu à l’invitation et il n’y avait pas que des « complotistes »  et des « antivaxs » parmi elles ! Nous avons même été honorés de la présence d’une échevine qui a confié « avoir appris des choses » et ne pas s’être sentie agressée dans ses convictions politiques personnelles, ce qui l’a pleinement rassurée sur notre démarche. L’atmosphère était effectivement à la détente et le bar est resté ouvert jusque tard, d’autant que des villageois ne partageant pas nos opinions ont néanmoins rejoint la salle après la projection pour partager le verre de l’amitié. Et dans mon coin d’Ardenne, il est de tradition que ce verre ne se consomme jamais au singulier….
 
À propos de verre,  non rempli de bière dans ce cas-ci, vous savez que j’ai scindé en deux parties l’infolettre relative  à mes opinions sur  l’eau. Dans la première partie, envoyée le 22 juillet,  je vous ai partagé mon sentiment que l’injonction de boire beaucoup ne se justifie guère et  que le signal de soif est un indicateur fiable de la nécessité de s’hydrater. Je vous recommandais néanmoins de ne pas attendre la manifestation de cet instinct car il y a beaucoup  plus à perdre  qu’à gagner en ne buvant pas suffisamment, sauf dans le cadre d’un jeûne sec. Dans ce premier volet, je vous faisais également part de mon scepticisme sur les vertus des eaux alcalines et de ma nette préférence pour les eaux (légèrement) acides, dont l’abondance dans la nature n’a, à mon sens,  rien de fortuit. Cette semaine, je vous donne mon avis sur la question des minéraux présents dans l’eau et sur l’utilité – ou pas –  de la filtrer pour en assurer la pureté. Comme précisé dans le premier billet, il ne s’agit que de mes « EAUpinions » sur un sujet complexe dont je suis loin de maitriser tous les aspects scientifiques. Si vous avez des commentaires à faire ou des éléments à apporter pour enrichir le débat, je vous invite à les partager sous la version en ligne de cette newsletter. Sachant que l’eau est un symbole de la connaissance, le natif du Verseau que je suis sera ravi que vous contribuiez ainsi à instruire autrui.
 
 
4. Assimilables, les minéraux ?
 
 
« L’eau vaut par ce qu’elle emporte, non par ce qu’elle apporte » : c’est en résumé ce que la médecine naturelle pense de la molécule d’H20. Autrement dit, cette boisson n’a aucune vertu alimentaire et ne sert qu’à nettoyer l’organisme car les minéraux qu’elle contient ne seraient pas assimilés par les êtres humains.  Pourquoi ? Parce que ces derniers sont « hétérotrophes », c’est-à-dire conçus pour prélever leur nourriture sur d’autres organismes. À l’inverse, la grande majorité des plantes sont dites « autotrophes » parce qu’elles sont capables de transformer de la matière minérale en matière organique, via la photosynthèse. Nous, il nous faut les manger pour vivre. Et ce n’est pas en buvant de l’eau qu’on pourrait se nourrir.   En toute logique, les praticiens en naturopathie recommandent donc de consommer une eau dont le résidu sec – c’est-à-dire la quantité de minéraux qui resteraient dans une carafe d’un litre après évaporation  complète – ne dépasse pas 200 mg. Pour les naturopathes initiés à la Bioélectronique de Vincent (BEV), la barre de la minéralité devrait même être abaissée à 50mg/l, ce qui oblige quasiment à filtrer l’eau du robinet ou qui restreint le choix d’eaux en bouteille à quelques marques seulement. En buvant toute autre eau, l’Homme s’exposerait à  « encrasser » son corps de minéraux non-assimilés, à épuiser ses reins, voire à développer des calculs rénaux. Je vous avoue pour ma part que cette argumentation m’a toujours laissé dubitatif. D’abord parce que, selon ce raisonnement, l’eau déminéralisée devrait être bonne pour la santé. Or c’est plutôt le contraire. Sans être toxique, l’eau expurgée de ses sels minéraux déminéraliserait progressivement un être humain si celui-ci en consommait souvent. Ensuite, ça voudrait dire que le thermalisme équivaut à du charlatanisme et que la consommation d’eaux minérales naturelles à des fins thérapeutiques est une mystification multimillénaire. J’ai du mal à croire que la tradition thermale, comme toutes les traditions médicales ancestrales, repose vraiment  sur du vent. Enfin, sans lui faire une confiance aveugle, je me fie  à la science pour trancher le débat. Or celle-ci semble indiquer que les minéraux présents dans l’eau, par exemple le calcium ou le magnésium, peuvent être « biodisponibles » et être ainsi bien absorbés au niveau de la muqueuse intestinale. Cette étude française, notamment, apporte des références allant dans ce sens. Mais si vous la lisez jusqu’au bout, vous verrez que son auteur a été rémunéré par Nestlé Waters,  le plus grand producteur mondial d’eau en bouteille, ce qui laisse planer un doute sur son objectivité. Eh oui, il y a des conflits d’intérêts partout et les recherches  dans tous les domaines peuvent être biaisées, inutile de vous faire un dessin ! Comme souvent, la vérité se situe peut-être à mi-distance des opinions opposées : les minéraux de l’eau sont facilement assimilables lorsqu’elle provient de la source  et que son  consommateur est déshydraté mais sont probablement peu assimilés lorsque le liquide a séjourné en bouteille ou en canalisation et que le buveur n’est pas carencé. En écrivant cela, je suis conscient que je vais  possiblement froisser Jean-Brice Thivent, le naturopathe renommé et chevronné qui rédige la rubrique « Avantage Nature » dans le mensuel Néosanté. Dans une série d’articles récents (numéros 118 à 120), notre consultant a encore brillamment défendu la thèse de l’absence d’assimilation en donnant des explications scientifiques très convaincantes. Argument massue : si les minéraux de l’eau pouvaient alimenter l’Homme en plus de l’abreuver, il lui suffirait de sucer des cailloux pour se minéraliser ! Mais ne te vexe pas, Jean-Brice, nous restons sur la même longueur… d’onde :  si je ne partage pas ta certitude que l’organisme humain ne tire aucun profit des eaux minérales,  je suis bien d’accord sur l’essentiel, à savoir qu’Homo Sapiens  est par nature hétérotrophe et qu’il a donc besoin d’aller chercher ses nutriments dans de la matière déjà organisée par la vie, autrement dit dans les végétaux ou les produits animaux. Je souscris à 100% à la conclusion de notre collaborateur qui a terminé sa série d’articles en plaidant que les minéraux et oligo-éléments doivent se trouver dans l’assiette et non dans le verre. Et d’ailleurs, n’est-ce pas ce que notre corps nous dit quand nous l’écoutons bien ? Si nous mangeons beaucoup de fruits et de légumes,  nous sommes bien hydratés et ne ressentons pas la soif. Je l’ai encore vérifié par temps de canicule : il me suffisait de forcer sur les légumes et fruits aqueux (tomates, concombres, raisins, pastèque, agrumes..) pour supporter facilement la chaleur. En revanche, l’envie de boire de l’eau est irrépressible après de gros efforts physiques accompagnés d’une abondante sudation, ce qui est quand même l’indice que la flotte peut, dans certaines circonstances,  apporter et pas seulement emporter.
 
 
5. La pureté fait-elle la santé ?
 
De façon dogmatique à mes yeux , nombre de professionnels de la santé naturelle continuent cependant  d’affirmer que l’eau de boisson doit être la plus pure possible, ce qui a fait le succès (et la fortune) de fabricants de filtres pour l’eau de distribution. Il y a quelques années, c’était le procédé de filtration par osmose inverse qui avait la cote. Aujourd’hui, ce sont plutôt les fontaines filtrantes opérant par gravitation qui attirent le client en quête d’eau purifiée. Les deux systèmes ont l’ « avantage » d’éliminer les minéraux inorganiques mais aussi la majeure partie des polluants (métaux lourds, pesticides, chlore…) et plus de 99% des contaminants naturels, c’est-à-dire les bactéries et les virus. Si son système est entretenu et les filtres régulièrement remplacés, le consommateur a donc l’assurance d’être à l’abri des « pathogènes »  de toutes sortes. Concernant les substances chimiques, cette garantie est  évidemment importante. Il y a quelques semaines, l’association française Agir pour l’environnement a encore balancé un fameux pavé dans la mare : après analyses, il s’avère que 7 bouteilles d’eau sur 9 contiennent des microplastiques embarqués lors de l’embouteillage ou relâchés par le récipient ! Ça veut dire qu’en buvant de l’eau de source emballée sous plastique, le consommateur a 78% de risques d’absorber des molécules artificielles potentiellement perturbatrices du système hormonal. Voilà qui apporte encore de l’eau au moulin des partisans de la filtration à tout crin : mieux vaut purifier la flotte du robinet que se ruiner en l’achetant en magasin.  D’accord, mais quid des micro-organismes présents naturellement dans l’eau ? N’est-ce pas jeter le bébé avec l’eau du bain que de faire barrage aux  bactéries et aux particules virales ? À ce sujet, permettez-moi de vous raconter une expérience involontaire que j’ai faite l’année dernière : pour une raison dont je ne me souviens plus, j’ai conservé pendant deux mois un bidon d’eau ramené à Bruxelles de mon village ardennais et un autre bidon d’eau oligominérale achetée en boutique bio. À ma grande surprise, les deux eaux ne se sont pas du tout comportées de la même façon : la première est devenue verte tandis que la deuxième est restée totalement translucide. Dans l’hypothèse que l’eau du commerce n’était pas du tout traitée, ça veut dire que l’eau de chez moi est bactériologiquement beaucoup moins pure et que des micro-algues peuvent s’y développer en quelques semaines à peine. Loin de m’effrayer, ce constat m’a au contraire enchanté : ça veut dire que mon eau de distribution est bigrement vivante, pas du tout chlorée et même pas soumise à des rayons UV avant d’être injectée dans le circuit. Et ça, pour moi, c’est capital. L’eau purifiée ou osmosée, ça n’existe pas dans la nature.  Nous sommes faits pour boire une eau qui contient encore un certain nombre de bactéries, lesquelles témoignent qu’il y a de la vie dedans. À force de boire une eau trop pure, on se saccage peut-être le microbiote  qui a besoin d’apport bactérien externe pour fonctionner de façon optimale. Et puis, n’est-ce pas cette flore aquatique qui expliquerait le pouvoir minéralisant de l’eau ? Ne seraient-ce pas les minéraux  véhiculés par la microfaune qui sont en réalité assimilés lorsqu’on boit une eau minérale naturelle ? Je me fourvoie peut-être mais il me  semble que mes interrogations ne sont point sottes. Pour rappel, mon village de Chevron est situé dans le Parc Naturel des Sources, où sont puisées les eaux de Spa. Et la ville de Spa, qui a donné son nom au substantif, est un peu la capitale historique et emblématique du thermalisme. À tort ou à raison, j’imagine donc que les vertus médicinales de son eau pourraient – aussi – être dues à sa relative impureté. En tout cas, je suis bien content de vivre où je vis maintenant à temps plein depuis un an. Si je comprends parfaitement que d’aucuns se soucient de filtrer leur eau domestique, je savoure ma chance de ne pas avoir à me tracasser pour ça. Je peux apprécier mon eau du robinet en songeant qu’elle est très naturelle précisément parce qu’elle n’est ni désinfectée ni filtrée. Elle a un petit goût de fer, mais c’est  aussi  cette spécificité de sa composition qui fait son charme et qui éclaire les propriétés que lui prêtent les curistes spadois. Sur une brocante, je viens d’acheter un vieux « Traité des eaux de Spa » expliquant que l’eau ferrugineuse est notamment bonne pour le sang dont elle favoriserait l’oxygénation. Je me fais peut-être des idées, mais j’ai justement l’impression de mieux respirer depuis que j’ai quitté Bruxelles pour m’établir ici. La qualité de l’air est sans doute pour beaucoup dans cette sensation mais on ne peut exclure que celle de l’eau y contribue. T’en penses quoi, Jean-Brice ?
 

Partager