LES PRODUITS LAITIERS : stop ou encore ?

Remontant au néolithique, la consommation de lait animal est logiquement déconseillée en nutrition paléo.
Et ce ne sont pas les arguments scientifiques qui manquent.

étape importante du passage du paléolithique au néolithique, la consommation de produits laitiers est au cœur de nombreuses recherches sur la santé, l’alimentation et l’évolution : comment certains peuples semblent-ils s’être adaptés à sa consommation ? Le sont-ils vraiment ? Et quels sont les impacts des produits laitiers, selon leur forme, sur la santé ? Comme le lait de vache représente 97% de la consommation de lait d’origine animale, c’est donc à sa composition que nous nous intéresserons. Composé à 86,6% d’eau, le lait de vache comprend 4,1% de graisse, 3,6% de protéines et 5% de lactose. Il contient également 0,7% de minéraux, dont le calcium. Chacun de ces éléments nécessiterait une étude approfondie, tant ils peuvent être problématiques. Ce premier article sur les produits laitiers sera donc une introduction aux questions relatives au lactose, à la caséine, au calcium, ainsi qu’aux hormones de croissance.

LE LACTOSE

L’intolérance au lactose est certainement le problème le plus connu. Le lactose est le « sucre » du lait, qui doit normalement être dissocié, par une enzyme, le « lactase », pour être digéré. Le problème est qu’entre 65 et 75% de la population mondiale ne produit pas cette enzyme, et ne peut donc pas « digérer » le lactose, qui reste dans l’intestin, endommageant les parois intestinales, et pouvant produire gaz, diarrhées, ballonnements, etc. La majorité de la population d’Europe semble actuellement capable de digérer le lactose, même si ce n’était pas le cas des premières populations humaines à atteindre l’Europe. Au cours de notre évolution, une part de la population a développé la capacité de continuer à produire du lactase à l’âge adulte. Mais cette adaptation génétique n’est pas également répartie dans la population mondiale. La majorité de la population asiatique et africaine est intolérante au lactose, avec des différences locales intéressantes. Ainsi, le Nord de l’Inde compte 63% de tolérants au lactose, alors qu’ils ne sont que 23% dans le Sud. En Afrique, certains peuples pastoralistes traditionnels tolèrent majoritairement le lactose, alors que d’autres peuples voisins, au mode de subsistance historiquement différent, comptent moins de 20% d’individus capables de le digérer.

Tout indique que cette mutation génétique est apparue avec la «Secondary products revolution» : les débuts de l’exploitation des bêtes pour des produits dits « secondaires », comme leur laine, leur force de traction, et… leur lait, il y a plus ou moins 8000 ans en Turquie, et 7000 ans en Europe (Roumanie).
Les historiens se basent d’une part sur les analyses des os d’animaux domestiques retrouvés : en déterminant leur âge et leur sexe, ils peuvent en déduire s’ils étaient élevés davantage pour leur lait ou pour leur viande. D’autre part, des acides gras retrouvés dans des restes de poteries indiqueraient à partir de quand celles-ci ont été utilisées dans la consommation de produits laitiers. Tous ces éléments vont dans le sens d’une consommation de lait qui aurait son origine dans le Proche-Orient, et qui se serait ensuite répandue vers l’Europe, cela dans une période néolithique déjà bien avancée. C’est-à-dire assez récemment à l’échelle de l’évolution humaine.

LA CASÉINE

La caséine, la protéine du lait, n’est pas moins problématique. Elle partage des ressemblances structurales avec le gluten (protéine des grains). On remarque d’ailleurs que l’ « intolérance au gluten » va souvent de pair avec une intolérance à la caséine. Le lait de vache, particulièrement riche en caséine (5 fois plus que le lait humain) est donc relativement indigeste, car l’intestin humain ne contient pas la présure des veaux (un coagulant présent dans leur 4ème estomac) leur permettant de « cailler » la caséine. Cela explique pourquoi beaucoup de sociétés ont traditionnellement consommé des formes fermentées de produits laitiers : la fermentation permet de cailler la caséine et la rend plus digérable par l’être humain. La fermentation permet par ailleurs de briser le lactose. On comprend donc pourquoi les populations humaines ont autant opté pour la fermentation, sous forme de fromage, de beurre cru, ou encore de Ghî (beurre clarifié indien) ou de Kefir (lait fermenté). Inversement, avec la pasteurisation, la caséine relâche davantage de peptides, augmentant la perméabilité de l’intestin.

Le CALCIUM

Ce qui fait le succès du lait, c’est souvent l’idée «qu’on a besoin de calcium pour les os». Plusieurs études ont montré qu’il n’y avait pas de lien significatif entre la consommation de lait et les risques de fracture. Par contre, une étude finlandaise suggère qu’une consommation de calcium provenant du lait est associée avec une augmentation des risques de cancer de la prostate. Et parmi l’ensemble des produis laitiers, une étude italienne montre clairement que c’est le lait qui est le plus associé au cancer de la prostate.

LES HORMONES

De manière très générale, le lait de vache est prévu pour… le veau. Evident ! Il en résulte que ce lait peut être un perturbateur endocrinien pour l’être humain. Ce sont surtout les IGF («insulin-like growth factor») qui sont incriminées: des hormones peptidiques ayant une structure chimique semblable à celle de l’insuline. Le lait de vache, riche en IGF-1, élève le taux d’IGF-1 chez l’humain, augmentant les risques de cancer du sein, du colon et de la prostate. En plus de favoriser la prolifération des cellules normales, les IGF-1 favorisent aussi la prolifération des cellules cancéreuses. Cela facilite l’angiogénèse, les métastases et la malignité de plusieurs formes de cancer.
Nous sommes très loin d’avoir fait le tour de la question de la consommation de lait. S’il est prouvé que ce n’est pas un aliment « paléo », l’impact sur la santé de ses différentes formes (cru ou pasteurisé, fermenté ou pas, entier ou écrémé, bio ou industriel) reste à explorer, dans une double approche, évolutionniste et médicale.

Yves Patte

Sociologue de formation, Yves Patte enseigne en Belgique le travail social et l’éducation à la santé. Il est également coach sportif et nutritionnel. Le mode de vie paléo représente la rencontre entre ses différents centres d’intérêts : un mode de vie sain, la respect de la nature, l’activité physique et sportive, le développement individuel et social. Il publie régulièrement sur « http://www.yvespatte.com et http://www.sportiseverywhere.com »
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