Les liens entre émotions et cancer

Les émotions jouent un rôle majeur dans l’apparition et la guérison du cancer. C’est la thèse que défend le Docteur Christian Boukaram[1], un oncologue canadien, dans son livre « Le pouvoir anticancer des émotions » paru fin 2011 aux Éditions de l’homme. Best-seller au Québec dès sa parution, ce livre ne sera diffusé en Europe qu’à l’automne 2012. Tandis que les esprits dogmatiques crient à l’arnaque pseudo-scientifique, la démarche de Boukaram inspire gratitude et reconnaissance à la majorité des lecteurs et aux médecins qui souhaitent pratiquer une médecine intégrative.

Le Docteur Boukaram transgresse un tabou médical majeur en confirmant le lien entre cancer et vécu psychique. Il prône l’équilibre émotionnel et l’ouverture de conscience comme voie de guérison. Il définit l’émotion comme « une pression psychologique qui nous pousse à agir, un message qui nous pousse à grandir » . Il décrit la synergie entre les émotions et les autres facteurs de notre environnement interne et externe dans l’apparition et l’évolution du cancer. Mais il nous met surtout en garde contre le danger de faire la sourde oreille à nos émotions. Le déni des émotions se manifeste par un recours à la distraction, la frustration, la dépression, l’anxiété et les habitudes toxiques (trop fumer, trop boire, trop manger…). Même s’il préconise l’adoption de saines habitudes de vie, il reconnaît que l’on ignore leur impact réel sur la santé. En revanche, des conditions anxiogènes intenses multiplieraient par 30 l’agressivité du cancer.

« La terreur du cancer est un plus grand fléau que le cancer lui-même. » Dès le début de son livre, Christian Boukaram présente l’acceptation de la mort comme un choix philosophique primordial. Parmi ses patients, ceux qui parlent de leur mort sont toujours plus sereins et évoluent mieux au sortir de leur cancer.

En raison de ses observations directes du lien entre émotions et cancer, le Dr Boukaram s’est intéressé à la littérature médicale sur le sujet. « Beaucoup de mes patients me rapportent, dès notre première rencontre, qu’ils croient avoir développé le cancer en raison de leur état mental. Ils disent avoir récemment subi une perte importante, ou vécu un désespoir hors de l’ordinaire ». Riche de son expérience clinique et de sa formation pluridisciplinaire, il a analysé des centaines d’études qui confirment le lien entre émotions, vécu intérieur et cancer. Il dresse un historique allant de Platon au Docteur Ryke Geerd Hamer, en passant par le Docteur Caroline Bedell Thomas qui, au bout de 30 années de suivi auprès de 1300 personnes, a conclu que le cancer était la maladie la plus clairement liée aux traits psychologiques.

Allant à l’encontre du dogme de la prédominance de la génétique dans l’apparition du cancer, le Docteur Boukaram explique que l’environnement familial, la culture, le climat émotionnel et relationnel sont davantage cancérigènes que nos gènes : les récentes recherches en épigénétique apportent la clé de la transmission familiale et trangénérationnelle du cancer. « Une étude effectuée auprès de 45 000 jumeaux montre que ces individus génétiquement identiques n’ont pas les mêmes risques d’avoir le cancer. » Il montre que les antécédents des parents biologiques n’ont aucune influence sur l’incidence du cancer chez les enfants, alors que les parents adoptifs transfèrent le risque d’avoir le cancer. « Le risque de cancer est multiplié par cinq chez les enfants adoptés quand les parents adoptifs ont eu un cancer. »

L’intérêt de Boukaram pour la neuropsychologie et la physique quantique lui ont permis de dépasser le dogme de la séparation du corps et de l’esprit et de voir le cerveau comme un organe qui connecte la conscience individuelle à la conscience universelle. Selon lui, il est illusoire de guérir l’anxiété avec des pilules car elles ne s’adressent pas à la cause mais servent à masquer les symptômes. Il pratique l’hypnose comme moyen de libérer l’inconscient de ses patients. Ces derniers livrent des témoignages qui illustrent comment ils ont guéri par une approche fondée sur la conscience. Les guérisons miraculeuses concernent ceux dont l’expérience du cancer a été l’occasion d’un éveil de conscience et d’une évolution accélérée. C’est en reprenant la responsabilité par rapport à leur santé que ces personnes récupèrent leur pouvoir personnel et vivent une transformation profonde. « Ces rescapés possèdent la capacité extraordinaire de reconnaître leurs besoins et d’exprimer leurs émotions. L’éveil libère de la souffrance et lance instantanément le programme de la guérison. »

Le Docteur Boukaram a une perspective sur la santé qui tient compte des trois composantes que sont le corps, les émotions et la spiritualité. Le problème de la médecine matérialiste est qu’elle mise exclusivement sur le volet physique et qu’elle néglige les deux autres. Boukaram dénonce l’échec du paradigme de l’oncologie classique qui aborde le cancer par des traitements strictement physiques de chirurgie, de chimiothérapie, de radiothérapie, d’hormonothérapie, de thérapie immunitaire. Ces derniers ont des conséquences graves :

  • Une perte de fonction par ablation des organes (chirurgie)
  • Les traitements agissent sur les cellules cancéreuses, mais aussi sur les cellules normales. Les lésions et la toxicité ont des conséquences à court, moyen et long terme sur la santé et la qualité de vie des survivants au cancer.
  • Lorsque les traitements ne parviennent pas à éliminer la tumeur, c’est parce qu’elle développe une résistance et devient encore plus agressive (comme les bactéries résistantes aux antibiotiques). Autrement dit, les traitements anti-cancer classiques peuvent augmenter la virulence de la tumeur. Ceci, peu d’oncologues ont l’honnêteté de le dire !

Comme il considère le cancer comme une maladie multifactorielle, Boukaram propose une approche pluridisciplinaire. Au lieu de morceler le patient et de s’adresser uniquement à sa composante physique, il pratique une médecine intégrative qui combine des traitements classiques avec des pratiques moins conventionnelles, avec le but de restaurer l’unité et l’intégrité de l’individu. Citons pêle-mêle les arts créatifs, le rire, les interactions personnelles authentiques, l’écoute et la compréhension de ses émotions et de son corps, la luminothérapie, l’hypnose et l’auto-hypnose, la respiration, la méditation, la visualisation, le yoga, l’activité physique, les massages thérapeutiques, l’alimentation, la qualité du sommeil, la relaxation, l’exposition au soleil (sans excès), les petits plaisirs de la vie.

Citant les travaux de Carl Jung, il souligne l’importance d’avoir des buts personnels. Souvent, les buts de l’existence sont donnés par l’extérieur : consommation, performance, accomplissement matériel. Face à une maladie comme le cancer, la futilité de ces buts apparaît en même temps que la question existentielle du sens profond de la vie. Boukaram suggère de renverser la perspective égocentrique en remplaçant la question « qu’est-ce que le monde peut faire pour moi ? » par « que puis-je faire pour le monde ? » Le but doit être difficile mais réalisable. Il permet de transcender l’égo, de s’abandonner dans le moment présent, d’atteindre l’état de flux décrit par le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi.

Boukaram recommande de cultiver la joie de vivre, la gratitude et la compassion par un travail quotidien. En acceptant de faire face à ce qui émerge du fond de nous avec courage, en vivant le moment présent, surgit l’expérience de l’amour inconditionnel, la paix, la sérénité. Se départir du réflexe de performance pour entrer dans la gratitude et la présence a pour effet de fortifier le système immunitaire. Par ailleurs, il insiste sur l’importance de l’action, qui répond au besoin négligé derrière ce qui s’exprime. Sortir de notre zone de confort pour braver nos peurs, franchir l’inconnu, aller vers la nouveauté nous permet de prendre soin de nos besoins et de grandir intérieurement.

Certes, le lecteur averti, déjà informé des causes biologiques et psychologiques du cancer, qui a exploré les approches holistiques en santé, n’apprendra probablement pas grand-chose de ce livre. Bien que le Docteur Boukaram appuie ses arguments par plus de 450 références, il laisse sur sa faim le lecteur avide de solides démonstrations scientifiques. Toutefois, force est de saluer le courage et l’honnêteté intellectuelle de cet oncologue, initialement formé à une perspective matérialiste de la santé. En accompagnant des patients atteints de cancer, il a eu la sensibilité de valider l’importance de leur vécu émotionnel et de leur attitude intérieure dans l’évolution de leur santé. Sa curiosité scientifique l’a incité à approfondir ses recherches et son intégrité lui donne le courage de publier ce livre qui, il y a à peine dix ans, l’aurait exposé à de sérieux blâmes professionnels. Par ailleurs, en côtoyant des patients dont la guérison s’est enclenchée par la reconquête du sens de la vie, il a renoué avec une spiritualité incarnée, dépouillée de tout dogmatisme. Il plaide en faveur d’une spiritualité axée sur la relation de l’individu avec lui-même, avec sa famille, ses amis, son milieu… Une spiritualité qui n’implique aucune appartenance à une institution, qui revient à l’essentiel : le fait d’être vivant, de vouloir aimer, s’aimer et s’accomplir. Enfin, il contribue à l’évolution de la médecine en pratiquant en milieu hospitalier une médecine intégrative qui reconnaît la sagesse des émotions et le sens de la maladie.

Cyrinne Ben Mamou


[1] Le Docteur Christian Boukaram est radio-oncologue, chef de service de radiochirurgie à l’hôpital Maisonneuve-Rosemont (Montréal, Canada), chercheur et professeur à l’Université de Montréal. Il est cofondateur et directeur de CROIRE, un organisme qui offre un soutien émotionnel et spirituel aux personnes atteintes de cancer.

http://drboukaram.com/

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