Editorial n°93

À l’heure d’écrire ces lignes, je guette la sortie imminente d’un livre très attendu dans le milieu des médecines alternatives « Gagner la lutte contre le cancer : la découverte dont la République n’a pas voulu ». Fera-t-il sensation ? Je crains bien que non. Écrit par la fille de Mirko Beljanski, cet ouvrage entend démontrer que le brillant biologiste décédé il y a 20 ans a été injustement persécuté en France et que ses recherches sont aujourd’hui validées dans des universités américaines. Je suis sceptique parce que j’ai connu à l’époque plusieurs médecins prescrivant les fameux « produits Beljanski » et n’obtenant guère de succès avec leurs patients cancéreux. Je suis sceptique également parce que le cas emblématique de François Mitterrand, soigné avec ces poudres à base de plantes, est indûment brandi comme preuve de leur efficacité. Un cas clinique ne prouve rien et l’ex-président français a survécu onze années à un cancer de la prostate, ce qui est loin d’être rare. Enfin, je suis sceptique parce que le chercheur maudit a lui-même succombé au cancer suite à ses condamnations ordinales et judiciaires. Dans Néosanté, il nous est déjà arrivé d’évoquer les propriétés anticancéreuses de certaines substances naturelles, notamment l’armoise, la racine de pissenlit, la vitamine C ou le cannabis. Nous le faisons encore ce mois-ci en publiant en ligne un article sur l’Aloe arborescens, une variété prometteuse d’aloès. Mais au grand jamais nous ne ferons miroiter que la phytothérapie pourra un jour faire aboutir « la guerre contre le cancer ». Cette approche belliqueuse et matérialiste nous semble vouée à l’échec puisque les vraies causes de la maladie sont invisibles pour les microscopes. D’ailleurs, l’actualité vient nous rappeler que les principes actifs végétaux peuvent très bien faire merveille in vitro et sur les animaux mais être inopérants chez l’être humain : comme vous le lirez plus loin (page 25), les vertus prêtées au thé vert sont aujourd’hui contredites par les études épidémiologiques !

 

Tout comme la complémentation alimentaire, le changement de nourriture et la restriction de celle-ci (autrement dit la pratique du jeûne) sont des méthodes qui, si elles peuvent aider à prévenir et contenir le cancer, n’en sont pas pour autant des remèdes absolus. Dans ses livres, le Dr Laurent Schwartz avance que la combinaison d’un régime cétogène et de quelques molécules naturelles peut faire reculer le crabe en oxygénant les mitochondries (centrales énergétiques de la cellule) et en modulant leur acidité. Dans son dernier bouquin, le cancérologue en rupture de ban prétend même que cette « approche révolutionnaire de la médecine » pourrait augurer la fin des maladies ! On cherchera pourtant en vain les références scientifiques justifiant d’allumer pareil espoir, le Dr Schwartz admettant lui-même qu’il s’agit d’un pari personnel et non d’une théorie vérifiée. De plus, des chercheurs belges viennent de découvrir que la cellule cancéreuse ne se goinfre pas seulement de sucre mais aussi de graisse, ce qui sape quelque peu les fondements de la thérapie cétogénique. À la restriction glucidique, il faudrait ajouter un sévère rationnement lipidique pour obtenir des résultats probants. Or si le jeûne complet permet seulement de tenir le cancer en respect, on ne voit pas comment un régime quelconque pourrait suffire à le guérir. Ce n’est pas en affamant le corps qu’on va durablement réparer les blessures de l’âme à l’origine des maux tumoraux. 

 

Si elles méritent une place dans la médecine oncologique, la phytothérapie et la nutrithérapie génèrent, à notre avis, un optimisme exagéré. Pour nous, ce sont des impasses qui montreront tôt ou tard leurs limites. Tant que le processus de cancérisation sera envisagé comme un mécanisme insensé et anarchique, toutes les médecines feront chou blanc. Paradoxalement, c’est du côté de l’allopathie conventionnelle que des signaux encourageants se manifestent. Naguère, nous vous avons narré la spectaculaire conversion psychosomatique du Dr David Khayat. À présent, c’est le renommé professeur Jean-Benjamin Stora qui fait son coming out : dans une interview à Medscape (lire page 4), ce médecin psychosomaticien vient de déclarer que, selon lui, « toutes les maladies sont psychosomatiques », à commencer par le cancer du sein dont il a maintes fois constaté dans sa patientèle féminine qu’il succédait à un choc émotionnel. Voilà un propos qui incitera peut-être d’autres médecins « classiques » à se pencher sur les racines psychiques du cancer. Mais à mes yeux, c’est du côté des détracteurs du dépistage que se situe la plus réjouissante disruption médicale. Dans l’interview qu’il nous a accordée,
le Dr Bernard Duperray (lire pages 12 à 14) ne se contente pas de dénoncer l’immense scandale de la mammographie systématique ne diminuant pas la mortalité globale et entraînant surdiagnostics angoissants et surtraitements mutilants. Le radiologue souligne que le naufrage du dépistage remet en cause le paradigme actuel et qu’il met en lumière le phénomène des rémissions spontanées. Comprendre comment des malades guérissent du cancer sans recevoir de traitement et sans rien changer à leurs habitudes de vie, c’est LE défi qu’il identifie comme urgent et primordial. Or la compréhension des guérisons ouvrira immanquablement la porte à celle de la somatisation des conflits existentiels. Telle est la vraie issue que Néosanté continuera de privilégier. 

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