Editorial n°88

Secousses chimiques ou physiques ?

Quand Pryska Ducœurjoly m’a proposé un dossier sur « la médecine psychédélique », j’avoue que j’ai un peu hésité avant d’accepter. Le fait que cette médecine utilise nombre de substances chimiques ou de versions synthétiques de molécules naturelles n’était pas pour me rassurer. Tous ces psychotropes artificiels émanent de la pharmacologie occidentale et ne me disent rien qui vaille. Mais je me suis souvenu avoir connu un homme leur devant la vie. Dans sa jeunesse, il avait touché à l’héroïne et était devenu complètement accro. Après plus de 15 ans de cet enfer, il en était sorti grâce à une prise de LSD, le psychostimulant hallucinogène très en vogue chez les hippies dans les années 60. Ce « good trip » sous acide ne lui permit pas seulement de rompre avec son héroïnomanie : elle lui procura une expérience mystique qui allait bouleverser son existence. Quand j’ai fait sa connaissance, il était à la fois astrologue et professeur de religion catholique, féru d’ésotérisme et d’alchimie ! Nous sommes devenus amis et il m’a initié à certains mystères du judéo-christianisme. Au souvenir de cette amitié, j’ai donc fait confiance à Pryska et je lui ai donné mon feu vert pour exposer dans Néosanté les « espoirs de la médecine psychédélique » (lire pages 6 à 11). Je ne le regrette pas car notre journaliste dévoile dans ce dossier des choses extraordinaires : les drogues de cette famille remplacent avantageusement les stupéfiants beaucoup plus dangereux, soignent également d’autres dépendances (tabac, alcool…) et ont des vertus thérapeutiques que les produits pharmaceutiques n’ont pas. Au lieu de conduire au délire et à la dissociation, les hallucinogènes psychédéliques guérissent très efficacement de nombreuses maladies mentales que les drogues légales aggravent ou dont elles ne traitent que les symptômes. Une révolution de la psychiatrie se trame en ce moment dans les laboratoires !

Ceci dit, mon enthousiasme pour la chimie a des limites. Aux drogues de synthèse, je préfère de loin les herbes et les potions « chamaniques » dont l’usage traditionnel remonte à la nuit des temps. Dans un lointain passé, les hommes-médecine utilisaient déjà le pavot et son opium, ou l’ergot de seigle et son alcaloïde présent dans le LSD. Les chamanes contemporains qui emploient toujours la peyotl, l’ayahuasca ou le… cannabis me semblent plus dignes de confiance que les apprentis-sorciers opérant dans les labos de Big Pharma. Aux molécules isolées et manipulées (et donc brevetables), il faut à mon sens préférer les plantes entières et tous leurs composants synergiques. Par exemple, la tisane d’Artémisia s’avère bien plus performante que son principe actif médicamenteux. Et comme la phytothérapie marche très bien, le système médical voit ça d’un très mauvais œil (lire page 4). Ce qui menace également la médecine des simples, c’est le réductionnisme matérialiste. à l’époque où je fréquentais mon ami mystique, j’ai aussi rencontré l’anthropologue suisse Jérémy Narby. Celui-ci est parti en Amazonie en croyant que les chamanes allaient lui révéler leurs découvertes et leurs succès de manière rationnelle, par la méthode « essais-erreurs ». Or c’est grâce à des drogues, en communiquant avec « l’esprit des plantes », que les sorciers amérindiens ont percé leurs secrets et maîtrisé leurs usages ! Jérémy a raconté tout ça dans son célèbre ouvrage
« Le serpent cosmique », dont je vous recommande la lecture. Je vous conseille aussi celle du livre « Soigner avec l’esprit des plantes », que nous présentons ce mois-ci dans la rubrique « Bon plan bien-être » (page 23). Mine de rien, ce bouquin pourrait faire avancer la science et la conscience puisqu’il suggère que la dimension spirituelle des végétaux est accessible sans hallucinogène, par le recours au rêve et aux ressources du ressenti.

Mais pourquoi toujours chercher des remèdes à l’extérieur de soi ? Nous avons une usine pharmaceutique interne qui s’appelle le cerveau. Et nous savons aussi que le cerveau cérébral est relié à d’autres foyers de neurones peuplant la peau, le ventre et la région du cœur. Par une action épigénétique, une « médecine douce » comme la méditation est à même de pousser l’organisme à sécréter des hormones bénéfiques et des neurotransmetteurs guérisseurs. Et que dire du corps ! Depuis l’aube de l’humanité, les hommes font bouger et trembler leurs enveloppes corporelles pour transformer leurs âmes et s’ouvrir à l’esprit, ce docteur intérieur aux pouvoirs curatifs exceptionnels. Les danses en transe – entendons aussi « transe en danse » – sont la plus vieille médecine du monde et il est heureux qu’on la redécouvre aujourd’hui ! Dans son article-reportage (lire page 28 et suivantes), notre journaliste Hughes Belin vous révèle qu’un thérapeute américain est en train de populariser le mouvement extatique et sa puissance thérapeutique. Et que la mode du Shaking atteint l’Europe via un curieux « gourou » balinais. À Néosanté, on trouve ça très intéressant car on se passionne pour les techniques consistant à se secouer physiquement pour évoluer psychiquement. Nous pensons que le tremblement corporel est une façon de susciter naturellement les phases de guérison et leurs « crises épileptoïdes » décrites par le Dr Hamer. Nous pensons aussi que le sport intense est un mouvement extatique qui s’ignore. Bref, nous privilégions et continuerons à privilégier les approches de santé naturelles faisant tout aussi bien que les pilules psychédéliques et faisant l’économie de leurs paradis artificiels.

Revue disponible à la pièce dans notre boutique:

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