Tempête sur le diabète: Nouveau regard sur un fléau planétaire

Élaborée dans les années 1920, la conception classique du diabète type 1 par carence en insuline n’a guère évolué. Le diabète est présenté comme une maladie auto-immune inexpliquée, favorisée par d’hypothétiques facteurs génétiques et environnementaux. Non seulement cette conception laisse de nombreuses questions sans réponses, mais le traitement du diabète reste problématique et ses complications inévitables. Plus grave encore, cette conception est totalement incapable d’expliquer l’évolution actuelle de cette maladie vers une épidémie planétaire. Face à cette situation, le Dr Jean-Michel Crabbé a remis l’ouvrage sur le métier et a développé une toute autre approche du fléau. Son livre « Tempête sur le Diabète » fait une synthèse de recherches multidisciplinaires et présente un faisceau d’arguments cliniques, biologiques et épidémiologiques qui conduisent à un nouveau modèle du diabète dans lequel le stress, le glucagon et le glucose jouent un rôle décisif. À ce jour, ce modèle très cohérent n’a fait l’objet d’aucune critique et il suscite l’adhésion de ceux qui l’examinent. Il nous éclaire sur les causes profondes du diabète de type 1, « effet pervers de la modernité », et il s’applique également au diabète type 2 et à l’obésité. Pour Néosanté, le Dr Crabbé a accepté de rédiger un résumé de son travail.

Par le Dr Jean-Michel Crabbé

Personne ne pouvait mieux juger et soutenir mon travail que le Prix Nobel de Médecine Roger Guillemin [3]. Dans les années 1970, ses travaux ont conduit à la découverte des premiers neuromédiateurs cérébraux et mis en lumière des réactions physiologiques au stress :
« Lire la Table des Matières du livre de J.-M. Crabbé est une stupéfaction pour le non initié, mais un sommaire des multiples causes qui conduisent au dérèglement des systèmes naturellement disponibles à notre naissance, comme on les reconnaît actuellement et qui toutes conduisent à un diabète le plus souvent accompagné d’obésité. Là encore les mécanismes impliqués sont de mieux en mieux expliqués.
Ces quelques phrases d’introduction n’ont d’autre but que de confirmer, à mon sens, le message de J.-M. Crabbé et d’inciter à en comprendre les raisons et les conséquences dans la société d’aujourd’hui et de par le monde… » Pr Roger Guillemin – Salk Institute, La Jolla, CA, décembre 2013.

La nécessité et l’imminence d’un changement radical de conception du diabète sont également confirmées avec le prix international d’endocrinologie Rolf Luft attribué au Pr. Roger Unger en 2014. Professeur d’endocrinologie et de médecine interne à Dallas, R. Unger a étudié pendant des années le rôle fondamental et négligé du glucagon au cours du diabète :

« Recentrer le diabète sur le glucagon : nous estimons que l’excès de glucagon, plus que la carence en insuline, est la condition sine qua non du diabète. » R. Unger, 2012 [20].

Depuis les années 1920, le diabète type 1 est présenté au public et même aux médecins comme une grande victoire de la médecine moderne. Ses symptômes sont attribués à une destruction des cellules β productrices d’insuline qui limite l’utilisation périphérique du glucose. Depuis la découverte d’anticorps spécifiques de fragments constitutifs des cellules β, le diabète type 1 est considéré comme une maladie auto-immune dont la cause reste inconnue, favorisée par d’hypothétiques facteurs génétiques et environnementaux. Au premier abord, le diabète type 1 semble bien connu, facile à comprendre et à traiter. Prolongé à vie, le traitement consiste à injecter régulièrement au malade l’insuline dont il a besoin en surveillant sa glycémie, son régime et son activité physique. Après les insulines d’origine animale, on utilise maintenant des insulines humaines obtenues par génie génétique. Habituellement, les patients reçoivent une éducation thérapeutique qui les aide à comprendre leur maladie et à ajuster eux-mêmes leur traitement et leur régime [6].

Depuis deux décennies, diverses observations épidémiologiques, expérimentales, cliniques et thérapeutiques remettent en cause ce modèle traditionnel du diabète. Le diabète se manifeste maintenant comme une nouvelle épidémie mondiale inexpliquée, hors de contrôle et invalidante. Cette épidémie est d’autant plus dramatique qu’elle touche des populations jusque là indemnes et sous-alimentées ou encore des enfants de plus en plus jeunes. Le diabète n’est pourtant pas une maladie contagieuse. Dans ce contexte épidémique inexpliqué, la responsabilité directe des anticorps et de facteurs génétiques ou environnementaux n’est absolument pas démontrée.

D’autre part, la surveillance de patients diabétiques montre que leurs glycémies ne respectent pas les règles classiques d’un équilibre glycémique : « Chez le diabétique, malheureusement, le foie relargue du glucose même quand la glycémie est élevée. » P. Froguel, 2002 [2].
À cause du fonctionnement imprévisible du foie, la glycémie d’un patient peut monter quand il reste à jeun ou baisser après un repas. Le traitement du diabète devient donc compliqué, empirique et source de conflits entre médecins et patients. Il impose une surveillance pluriquotidienne ou même continue de la glycémie, des adaptations régulières des repas et des doses d’insuline, le recours fréquent à de nombreux spécialistes. Chez un enfant en bas-âge, un diagnostic de diabète va bouleverser la vie de famille jour et nuit, épuiser les parents et perturber la scolarité. Même bien suivi, le traitement ne garantit pas des glycémies stables et il n’évite pas des complications vasculaires, neurologiques ou métaboliques invalidantes à long terme.
Avec le diabète type 1 par carence en insuline, l’obésité et le diabète type 2 forment une triade de maladies métaboliques que la médecine sépare et présente comme entièrement différentes, en dépit de leurs nombreux points communs. L’obésité est attribuée à un trouble du comportement alimentaire associé à un stockage anormal de graisses ; le diabète type 2 serait dû à une résistance à l’action de l’insuline
Le modèle classique du diabète type 1 a semblé satisfaisant pendant plus d’un demi-siècle grâce aux effets bénéfiques de l’insuline, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Basé sur les connaissances élémentaires des années 1920 avec les dogmes et les simplifications de cette époque, il est en désaccord avec de nouvelles observations et avec l’apparition d’une épidémie. La première partie de ce document présente sept observations contradictoires les plus significatives faites au cours des dernières décennies à propos du diabète. Dans la deuxième partie, la synthèse de ces connaissances nous conduit à un nouveau modèle du diabète type 1 beaucoup plus cohérent.

Sept aspects méconnus du diabète type 1

    • 1) La toxicité du glucose sur les cellules β productrices d’insuline – Face à la disparition progressive et inexpliquée des cellules β, il faut d’abord rappeler que la surcharge en glucose est la toute première cause connue – et oubliée ou ignorée – de mort par épuisement des cellules β et de diabète (Voir Figure 2). Expérimentalement, « les apports massifs en glucose provoquent la mort par surcharge des cellules β. » H. Zollinger, 1971 [23].
      Cet effet toxique du glucose sur les cellules β est observé en cas d’apports alimentaires excessifs ou de perfusion de glucose, mais aussi avec des traitements comme la cortisone qui augmente la synthèse endogène du glucose.

2) L’envahissement des îlots pancréatiques par des cellules α – La description déjà ancienne des lésions microscopiques du pancréas diabétique a également un grand intérêt
« L’examen du pancréas diabétique montre une énorme augmentation du nombre des cellules α productrices de glucagon dans les îlots, normalement 12 à 15 cellules α par îlot. Cette règle est toujours valable, même dans le diabète traité. » H. Zollinger, 1971 [23].
L’envahissement des îlots par des cellules α sécrétrices de glucagon est un phénomène inexpliqué et ignoré par le modèle classique. Tout se passe comme s’il existait des micro-adénomes à cellules α, ce qui peut expliquer une synthèse excessive de glucose et une surcharge dangereuse pour les cellules β.

  • 3) Le rôle essentiel du glucagon – D’autres travaux récents confirment l’importance des cellules α, du glucagon et d’une production excessive de glucose au cours du diabète type 1. Pour l’endocrinologue et chercheur Roger Unger, « le glucagon est la condition « sine qua non » du diabète ». Les travaux de R. Unger montrent que l’excès de glucagon est responsable de la majorité des symptômes du diabète. Ils montrent aussi qu’en cas de carence complète en insuline, un traitement antagoniste du glucagon peut faire disparaître les principaux symptômes cliniques et biologiques du diabète.
  • 4) Le Syndrome général d’adaptation au stress de Hans Selye – Au milieu du XXe siècle, H. Selye étudiait la chronologie des réactions physiologiques au stress chez les mammifères. Il définissait un « Syndrome général d’adaptation au stress » évoluant en trois phases successives : une phase d’alarme, une phase d’adaptation au stress, et une phase d’épuisement avec apparition des symptômes morbides de la maladie [18]. Après avoir servi de base de recherche pendant plusieurs décennies, ce modèle très pertinent a été délaissé parce que les effets du stress étaient difficiles à reproduire et ses mécanismes centraux étaient encore inconnus. Aujourd’hui, le modèle de H. Selye s’adapte parfaitement à l’évolution chronologique du diabète.
  • 5) Le stress et les mécanismes centraux diabétogènes – Dès les années 1920, on savait qu’une asphyxie brève peut entraîner une hyperglycémie prolongée [8]. En 1977, la découverte des neuro-hormones a été récompensée par le prix Nobel attribué à Roger Guillemin et Andrew V. Schally. Ces chercheurs ont montré que le cerveau produit une ou plusieurs centaines d’hormones qui contrôlent tous les métabolismes périphériques [3]. Dans certaines situations de stress intense, le système nerveux végétatif [16], le système hormonal et les neuro-hormones augmentent la sécrétion de glucagon et la production de glucose. Ces mêmes systèmes neuro-hormonaux diminuent l’utilisation périphérique du glucose (insulinorésistance), ils stimulent la prise alimentaire, modifient le transit digestif et l’assimilation des nutriments. Ces interactions complexes ne respectent pas le principe d’équilibre homéostatique de la glycémie et elles sont diabétogènes. En cas de stress important, ces systèmes interviennent de façon à fournir davantage de glucose au système nerveux central en augmentant la production de glucose hépatique et en diminuant son utilisation périphérique, en particulier musculaire.
  • 6) Les nécroses cellulaires et l’apparition d’auto-anticorps – L’apparition d’auto-anticorps dirigés contre des éléments des cellules β productrice d’insuline est un phénomène bien connu en immunologie – voir C. Ponvert [15] : en cas de nécrose cellulaire d’origine toxique ou autre, les fragments intracellulaires libérés sont reconnus comme des substances étrangères, c’est-à-dire des antigènes. Ils déclenchent une inflammation locale et l’apparition d’auto-anticorps, un mécanisme connu pour le cristallin, la thyroglobuline, les spermatozoïdes ou la myéline.
    Dans le cas du diabète type 1, la destruction de cellules β par une surcharge en glucose explique l’aspect inflammatoire des îlots et l’apparition d’anticorps dirigés contre des fragments de ces cellules nécrosées.
  • 7) L’épidémiologie et les facteurs environnementaux du diabète – Les études épidémiologiques récentes ont identifié et hiérarchisé les facteurs environnementaux directement associés à la pandémie de diabète et d’obésité partout dans le monde. Contre toute attente, aucun agent infectieux ou toxique n’est responsable de cette pandémie. Le diabète n’est pas une maladie héréditaire et il se propage dans des populations où cette maladie était totalement inconnue [12]. Le diabète ne dépend pas davantage de facteurs alimentaires. Dans les pays développés comme les USA, la diminution de la ration calorique moyenne s’est accompagnée d’une augmentation inexpliquée de l’obésité et du diabète, c’est le « paradoxe américain » [5]. Dans les pays pauvres et les populations sous-alimentées, les études de l’OMS montrent que les dénutritions coexistent avec une progression du diabète et de l’obésité [10]. Le diabète n’est pas caractéristique des populations occidentales sédentaire et vieillissantes. Il se déclare maintenant chez des enfants de plus en plus jeunes et le diabète type 2, autrefois diabète de la maturité, touche aussi des enfants.

En revanche, les changements de mode de vie intervenus à l’échelle de la planète sont clairement associés à cette pandémie : « Le diabète, effet pervers de la modernité. » [11] Chez l’adulte, la destruction des communautés traditionnelles, la rupture des liens entre l’homme et la terre, l’exode rural représentent des stress considérables, un risque nutritionnel et même un danger pour la survie de l’espèce en relation directe avec cette pandémie. Chez le petit enfant, l’abandon précoce de l’allaitement maternel et la rupture de la relation mère-enfant représentent un stress vital comparable à la rupture entre l’homme et une terre nourricière. Indépendamment de la ration calorique, ce stress crée chez l’enfant des conditions neuro-endocriniennes, immunitaires et affectives favorables au développement du diabète et d’autres maladies métaboliques, infectieuses, tumorales ou psychiques [4, 9, 14]. Il est même urgent de dire que l’allaitement maternel est d’une importance vitale pour la mère et de l’enfant, on peut presque dire une question de vie ou de mort [19]. Ensuite, sur un terrain génétique sans doute favorable, d’autres facteurs alimentaires, toxiques ou infectieux, les stress de la vie citadine, la privation de sommeil et la désorganisation des rythmes biologiques favorisent la décompensation d’un diabète ou déséquilibrent un diabète traité .

Synthèse et nouveau modèle du diabète type 1

La synthèse des données épidémiologiques, expérimentales, histologiques et cliniques précédentes est simple. Elle nous conduit à un modèle très cohérent du diabète type 1 dans lequel le stress et la production de glucose jouent les rôles essentiels.
Les stress intenses et prolongés identifiés par les études épidémiologiques déclenchent une réaction primaire d’alarme avec une surproduction de glucagon et de glucose. Au cours d’une deuxième phase d’adaptation silencieuse parfois prolongée, la surcharge en glucose épuise et détruit progressivement les cellules β. Ces nécroses cellulaires sont responsables de l’apparition d’auto-anticorps dirigés contre les fragments de ces cellules ( voir figure 4).
[Figure 4-Stress_Diabete.jpg]
[Légende figure 4– Stress et diabète : la réaction centrale d’alarme augmente la production de glucose. Le glucose en excès provoque la mort par épuisement des cellules β, l’apparition d’anticorps spécifiques et un diabète par carence en insuline.]
Troisième phase du modèle de H. Selye, les signes cliniques et biologiques cardinaux du diabète apparaissent quand environ 90 % des cellules β sont détruites : hyperglycémie, polyurie-polydypsie, glucosurie, acétonémie, amaigrissement, etc. C’est ce stade diabète-maladie que l’on traite par l’insuline.
Dans cette chronologie du diabète, la période de latence – deuxième phase d’adaptation au stress de H. Selye – peut se prolonger pendant des mois ou des années, sans ou avec détection d’anticorps. Cette durée variable rend très difficile l’identification des stress primaires associés au diabète. Ainsi l’exode rural et la rupture de la relation mère-enfant sont d’autant plus mal reconnus comme stress primaires du diabète qu’ils sont considérés apriori comme des conditions inévitables du progrès.
Cependant les effets du stress sont confirmés par de nombreux patients, aussi bien pour le déclenchement de leur diabète que pour les déséquilibres ultérieurs. L’interrogatoire attentif de diabétiques retrouve souvent un traumatisme plus ou moins ancien comme dans cet exemple : « J’ai toujours été persuadée que mon diabète s’est déclenché à l’âge de dix ans parce que j’avais perdu ma mère dans un horrible accident qui m’a marquée à vie à l’âge de quatre ans. »
Chez les diabétiques traités, le stress et l’hypersécrétion de glucagon restent responsables d’une surcharge en glucose [2] avec des instabilités glycémiques et des difficultés thérapeutiques. Comme l’affirme R. Unger, « l’hyperglucagonémie est présente dans tous les diabètes instables » [20]. En pratique, la surveillance des patients montre que leurs glycémies ne dépendent pas simplement du régime, des doses d’insuline et de leur activité physique, comme avec les témoignages suivants :

  • -Un diabétique type 1: « Le stress intervient-il à ce point sur la glycémie ? Cet après midi je me suis disputé avec une personne pour des bricoles. 30 minutes après j’ai commencé à me sentir très mal, j’ai pris ma glycémie et j’étais à plus de 3,30 g/l alors qu’une heure trente avant j’étais à 1,60. »
  • -Un diabète type 1 apparu dans les six mois après un stress vital : « … Je suis traité avec une pompe à insuline. En période de repos, vacances et weekends, mes bolus et besoins de base sont très faibles. Pendant la semaine au travail, mes glycémies sont anormalement très élevées. »
  • -Une diabétique obèse sous insuline lente : « En temps normal, j’ai besoin de 60 à 70 unités d’insuline par 24 h. Pendant mes séjours au Maroc, mes besoins en insuline sont inférieurs à 10 unités par 24 h, phénomène que mon diabétologue ne comprend pas.»

Avec ce nouveau modèle, certaines relations communément admises au sujet du diabète doivent être inversées : c’est l’excès de glucose qui détruit les cellules β, et non l’inverse ; ce sont les nécroses cellulaires qui induisent l’apparition d’auto-anticorps, et non l’inverse. La prise en compte du stress explique enfin pourquoi le diabète est devenu épidémique à la fin du XXe siècle, accompagnant l’extension du mode de vie occidental à la planète toute entière. On peut alors envisager de nouvelles stratégies préventives – adaptation du mode de vie – ou thérapeutiques – inhibiteurs du glucagon.
Le cas du diabète type 1 n’est pas unique en son genre et les mêmes observations s’appliquent au diabète type 2 et à l’obésité, maladies du stress et du monde moderne. Le diabète type 2 et l’obésité concernent essentiellement, comme le diabète type 1, les métabolismes énergétiques et l’utilisation du glucose. Comme le diabète type 1, ils touchent sur le même mode épidémique toutes les populations qui perdent leurs traditions et leurs relations avec la terre en adoptant le mode de vie industrialisé et urbanisé occidental avec une diminution de l’allaitement et de la relation mère-enfant
Dans le cas du diabète type 2, la surcharge en glucose induite par le stress s’accompagne d’une insulinorésistance qui s’oppose à l’utilisation périphérique du glucose au profit du système nerveux central. L’activité physique du patient diminue et il se sent fatigué, mais son médecin lui dit de faire du sport. À long terme, l’insulinorésistance s’accompagne d’une hyperglycémie avec des complications organiques invalidantes et une évolution secondaire vers un diabète type 1 par surcharge des cellules β avec apparition d’auto-anticorps.
Dans les cas d’obésité, l’hyperproduction de glucose induite par le stress s’accompagne d’un stockage parfois démesuré sous forme de tissus adipeux. Par la suite, l’insulinorésistance peut limiter la prise de poids et favoriser une évolution vers un diabète type 2. Ainsi l’obésité précède souvent un diabète type 2, qui lui-même précède souvent un diabète par carence en insuline.

Conclusion

Les diabètes type 1, type 2 et l’obésité ont une cause commune profonde, négligée par la physiologie classique : une réaction neuro-hormonale complexe avec une surproduction d’abord asymptomatique de glucagon et de glucose. Ensuite, la symptomatologie varie en fonction des particularités génétiques du patient, de son environnement et des autres stress auxquels il est soumis. Partout dans le monde, le stress primaire du diabète et de l’obésité est le bouleversement du mode de vie de populations entières, et la Chine nous en donne aujourd’hui un exemple dramatique :
« Sur un échantillon représentatif des adultes chinois, la prévalence des diabètes est de 12 % et la prévalence des prédiabètes est de 50 %. Cela pourrait représenter 114 millions d’adultes diabétiques et 493 millions de prédiabètes. » Yu Xu, 2013 [22].
Cette situation fait suite à un exode rural massif et dans vingt ans, des centaines de millions de chinois souffriront des complications métaboliques, vasculaires ou neurologiques de leur diabète et de leur obésité. Comme la médecine occidentale, la médecine chinoise a complètement échoué face à cette épidémie inattendue.
L’origine du diabète type 1 n’est pas auto-immune, c’est la conséquence indirecte de la destruction des communautés rurales traditionnelles, la conséquence de la rupture entre la mère et l’enfant, la conséquence des multiples stress de la vie moderne, la conséquence de ce qu’on appelle « le progrès ». Dans le monde moderne, diverses maladies non contagieuses se propagent sur un mode épidémique parce qu’elles dépendent étroitement du même mode de vie et des mêmes stress que le diabète ou l’obésité. Ainsi de nombreuses études épidémiologiques montrent que l’insulinorésistance du diabète type 2 est associée à une plus grande fréquence des cancers. Dans ce cas, la réaction d’alarme déclenchée par un stress important intervient sur le métabolisme du glucose, mais aussi sur l’immunité et la cancérogénèse. L’exemple du diabète montre les nouvelles pistes que la recherche et la médecine devraient explorer : reconnaître enfin les effets du stress, du mode de vie, du système psychique et des fonctions neuro-hormonales centrales sur les fonctions physiologiques périphériques.

À consulter : www.sitemed.fr/diabete
À lire : Tempête sur le diabète Tempête, Dr Jean-Michel Crabbé–Éditions Academia/l’Harmattan

NOTES

La façon dont la médecine académique ignore ses propres découvertes est tout à fait déconcertante :

    1. 1. Bertrand X., ministre de la santé en France en 2007 : « Et nous avons besoin de recherche fondamentale sur les liens entre la dérégulation du sommeil et certaines maladies telles que le diabète. » Le manque de sommeil est un stress potentiellement diabétogène.
    2. 2. Froguel P. La découverte des gènes du diabète, Vidéo-conférence de 2002 sur canal-u.tv : « Chez le diabétique, malheureusement, le foie relargue du glucose même quand la glycémie est élevée. »
    3. 3. Guillemin R. Peptides in the Brain. The New Endocrinology of the Neuron. Nobel Prize in Physiology or Medicine 1977, Nobel Lectures.
    4. 4. Harder T. and all. Duration of breastfeeding and risk of overweight: a meta-analysis. Am. J. Epidemiol. 2006 ; 163(9) : 870-2.
    5. 5. Heini A. and al. Divergent trends in obesity and fat intake patterns: the american paradox. American Journal of Medicine, 1997 : « La diminution des apports en graisses et en calories avec l’utilisation fréquente de produits basse-calories s’accompagne d’une augmentation paradoxale de la prévalence de l’obésité. »
    6. 6. Inserm.fr. Diabète de type 1, Diabète de type 2 et Obésité. Dossiers d’information 2013.
    7. 7. Knutson K. and al. The Metabolic Consequences of Sleep Deprivation. Sleep Med Rev, juin 2007 : « L’augmentation mondiale du diabète et de l’obésité est alarmante et les causes de cette pandémie ne sont pas connues. Les études expérimentales et épidémiologiques indiquent que le manque de sommeil peut jouer un rôle dans cette augmentation de la prévalence du diabète et de l’obésité. »
    8. 8. Macleod J. Nobel lecture – prix Nobel de médecine 1923 : « Chez les poissons témoins exposés à l’air pendant une durée égale à celle de l’ablation chirurgicale des îlots – environ 15 minutes – nous avons découvert que la glycémie augmente parfois autant que chez les poissons qui ont subi l’ablation des îlots. »
    9. 9. Éditions de l’OMS. La santé mentale : nouvelle conception, nouveaux espoirs. Rapport sur la santé dans le monde, 2001 : « L’anxiété et la dépression déclenchent une cascade d’altérations des fonctions neuro-hormonales et immunitaires, et prédisposent à toute une série de maladies physiques. »
    10. 10. Éditions de l’OMS. Obésité et surpoids. 2013 : « Nombre de pays à faible ou moyen revenu sont aujourd’hui confrontés à une double charge de morbidité. […] Il n’est pas rare de constater à la fois dénutrition et obésité dans un même pays, dans une même communauté voire dans un même ménage. »
    11. 11. Papoz L. Inserm. Le diabète de type 2 dans les Dom-Tom: un effet pervers de la modernité. Institut de Veille Sanitaire, 20-21/2002.
    12. 12. Papoz L. Inserm. Type 2 diabetes in the French overseas Departments and Territories, the « syndrome of Nauru ». Diabetes Metab., 2002 : Épidémie de diabète sur l’île Nauru : « En quelques décennies, la prévalence du diabète de type 2 a atteint 40 % chez les adultes alors que la maladie était inconnue auparavant. »
    13. 13. Perlemuter L. Diabète et maladies métaboliques. Elsevier-Masson, 2003. Les cellules α : « Pour certains auteurs, il existerait au cours du diabète sucré un dysfonctionnement primitif des cellules α sécrétrices de glucagon. »
    14. 14. Pettitt D.J. et coll. Breastfeeding and incidence of non-insulindependent diabetes mellitus in Pima Indians. The Lancet 1997. « …il n’y a aucun doute que l’allaitement maternel protège les enfants contre un grand nombre de maladies dont le diabète… Les professionnels de la santé doivent promouvoir et encourager l’allaitement maternel, toujours et partout où cela est possible. »
    15. 15. Ponvert C. et coll. Immunologie fondamentale et immunopathologie. Édition Marketing, 1998.
    16. 16. Razavi R. Sensory Neurons Control β-Cell Stress and Islet Inflammation in Autoimmune Diabetes, Cell 2006 : « Des chercheurs (université de Calgary) ont découvert que le diabète dépend d’anomalies des récepteurs des terminaisons nerveuses présentes dans les îlots pancréatiques qui produisent l’insuline… »
    17. 17. Reinberg A. Chronobiologie et chronothérapeutique. Flammarion 2003. « La méthode courante d’utilisation des pompes à insuline ne prend pas en compte les rythmes biologiques et ne contrôle qu’imparfaitement le diabète… Ce faisant, le remarquable progrès technique que représentent les pompes programmables n’est que partiellement mis à profit. »
    18. 18. Selye H. The Stress of Life, Le Stress de la Vie. Gallimard, 1962, 1975.
    19. 19. Sguassero Y. Optimal duration of exclusive breastfeeding: RHL commentary (last revised: 28 March 2008). The WHO Reproductive Health Library; Geneva; World Health Organization (OMS).
      Cette revue de la littérature montre que l’allaitement maternel est parfois même une question de vie ou de mort, pour la femme elle-même et pour son enfant :
      « […] Tout d’abord, il est prouvé depuis longtemps que les enfants nourris au sein n’ont pas le même développement que ceux qui ont une alimentation artificielle. Deuxièmement, la recherche récente montre que l’allaitement a des avantages à long terme, avec une protection possible contre l’obésité et le cancer du sein.[…] En accord avec cette revue de la littérature, l’allaitement exclusif pendant six mois suivi d’un allaitement accompagné d’une alimentation adaptée sont recommandés comme règle générale aussi bien dans les pays développés que dans les pays en voie de développement. »
      « […] Là où les données manquent, nous avons besoin d’études randomisées fiables, sauf pour la mortalité infantile, parce qu’il serait très délicat, du point de vue éthique, de faire ce genre de recherche avec comme résultat la mortalité infantile. » (NB: de telles études montreraient l’extrême importance la mère et son rôle irremplaçable auprès de l’enfant.)
      « […] L’allaitement au sein contribue à la bonne santé de la mère dans les suites immédiates de l’accouchement en améliorant la contraction de l’utérus et en diminuant les pertes sanguines. À court terme, l’allaitement retarde le retour de la fécondité des femmes, et à long terme il diminue le risque de cancer du sein et de l’ovaire. »
    20. 20. Unger Roger H., lauréat 2014 du prix Rolf Luft. Glucagonocentric restructuring of diabetes: a pathophysiologic and therapeutic makeover. J. Clin. Invest., janvier 2012.
    21. 21. Wilhelm J.-M. – Intérêt d’une approche chronobiologique du diabète de type 2. Annales de Médecine Interne, mars 2002 : « Le diabète de type 2 est une affection dont la complexité se déploie non seulement dans la diversité des paramètres métaboliques perturbés, mais aussi dans les variations dans le temps de ces perturbations. »

22. Yu Xu, PhD1 and all. Prevalence and Control of Diabetes in Chinese Adults. JAMA, 2013.

  1. 23. Zollinger H. Abrégé d’Anatomie Pathologique. Tome 1 et 2, 1970-71.
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