Questions à Emmanuel Pascal, auteur de Les 3 émotions qui guérissent

Emmanuel Pascal

« Si les émotions ont du pouvoir sur nous, nous aussi avons pouvoir sur elles. »

Comment vous êtes vous intéressé au pouvoir des émotions ?

J’écrivais des livres de cuisine diététique et je voyais qu’ils étaient très lus… Mais peu appliqués ! J’ai cherché un moyen de rendre service aux personnes qui ne parvenaient pas à faire les changements favorables à leur santé malgré leur intérêt. Je me suis rendu compte qu’à long terme ce ne sont pas nos connaissances qui dictent nos comportements mais nos émotions.

Mais que faire avec ces émotions ?

C’était toute la question. Pouvait-on modifier les émotions de manière à adopter un comportement sain ? J’ai cherché et ce que j’ai trouvé m’a tellement passionné que c’est devenu mon sujet d’étude et ma pratique principale. Les émotions ont une portée immense ! Elles sont essentielles à la vie. Elles déterminent non seulement notre comportement mais aussi notre santé mentale et physique.

Comment expliquez-vous que ce pouvoir des émotions ait, pendant si longtemps, été autant sous-estimé ?

Mais dans la littérature, on ne parle que de ça ! Tout le théâtre classique est basé sur le duel émotion-raison. Grâce aux émotions, on a de grands mélos littéraires ou de cinéma. C’est vrai que souvent, l’émotion à le rôle du grain de sable qui empêche que les choses tournent rond. Sinon, il n’y a pas d’intrigue… Pourtant, les sages et les prophètes aussi savent qu’on ne touche pas les gens en s’adressant uniquement à leur raison. Le Bouddha, Jésus-Christ, Gandhi, Martin Luther King ou l’abbé Pierre ont touché des foules d’êtres humains par leur capacité à parler le langage des émotions, le langage du coeur. Seule la science faisait l’impasse sur le sujet. Il y a même eu un dénommé Pasteur pour affirmer que les microbes étaient les responsables des maladies ! Mais les choses changent. On sait aujourd’hui que lorsque l’on inocule le virus du rhume à quelqu’un, c’est son niveau de stress qui va déterminer la probabilité qu’il attrape effectivement un rhume. Des études équivalentes dans tous les domaines de la santé s’accumulent, sans parler du décodage biologique qui n’est pas encore reconnu en Europe.

Et une fois qu’on sait qu’il y a un lien entre stress et maladie, qu’est-ce qu’on fait ?

Tout d’abord, on tord le cou à deux croyances :

La première, c’est que nos émotions ne font que s’opposer à notre raison. La neurobiologie, grâce à des chercheurs comme Antonio Damasio a montré que « la capacité à ressentir et exprimer des émotions est nécessaire à la mise en œuvre d’un comportement rationnel ». Les émotions sont nécessaires à la vie et à la santé, tout simplement.

La deuxième croyance, c’est que nous ne pouvons rien à nos émotions. Et c’est peut-être pour cela que la médecine officielle les a laissées de côté. Peu d’entre nous savent que si les émotions ont du pouvoir sur nous, nous aussi avons pouvoir sur elles.

Si nous en prenons conscience, nous pouvons nous employer à les réguler. C’est le début d’une belle exploration.

Dans votre ouvrage, vous dîtes que les émotions négatives (peur, colère, dégoût) sont « d’excellentes urgentistes » mais « de vraies empoisonneuses si on ne parvient pas à les réguler dans le temps ». Pouvez-vous nous en dire plus ?

Les émotions négatives sont extrêmement utiles… Pour votre survie. Si vous aviez une lésion cérébrale qui vous privait de l’émotion peur, vous prendriez des risques insensés! La colère vous permet de faire fuir un agresseur, que ce soit physiquement ou psychologiquement, en l’intimidant. Quant au dégoût, il sert à éviter de vous empoisonner ! Transposé dans la psychologie, il vous fait vous détourner des situations « toxiques ».

Les émotions que l’on appelle négatives nous poussent à nous détourner des situations qui nous sont défavorables. Elles nous permettent une action immédiate qui préserve notre intégrité physique ou psychologique. Le problème survient quand une émotion s’installe en décalage avec la réalité du moment. Je prends un exemple de mon livre : Vous êtes dans le métro. Quelqu’un vous frôle avec insistance : un pickpocket ! Aussitôt, vous portez la main à votre poche pour préserver votre portefeuille. Le voleur s’en va… Avant toute pensée, c’est l’émotion peur qui a sauvé votre argent. Jusqu’ici tout va bien, mais si vous vous mettez à penser des choses telles que : « On est en sécurité nulle part. », ou « C’est pas vrai, je les attire ! », vous envoyez un nouveau message d’alerte à vos centres émotionnels. Vos émotions sont dès lors décalées du réel et elles vous perturbent au-delà de ce qui est nécessaire pour garder votre portefeuille. Et cette histoire peut durer longtemps ! Si au contraire, vous parvenez à réguler cette émotion, celle-ci va s’apaiser rapidement une fois le danger passé. Il y a des techniques pour cela.

Selon vous, certaines émotions ou sentiments positifs ont des effets « guérisseurs » sur le plan physique et psychologique. Par quels mécanismes ?

A chaque fois que vous ressentez une émotion ou un sentiment, votre cerveau envoie un cocktail chimico-hormonal au coeur et au reste du corps afin qu’ils se comportent en conséquence.

Dans le positif, cela donne ceci : Vous êtes touché par un film sur Mère Teresa. Un sentiment de compassion vous gagne. Votre physiologie toute entière témoigne d’un état de relaxation et votre système immunitaire se renforce, ce que l’on peut vérifier entre autres par votre taux de lymphocytes T. Autre cas : Vous rencontrez une personne que vous appréciez. Vous vous sentez soudain tout joyeux. L’ensemble de vos paramètres physiologiques s’améliorent : Votre taux de cortisol, l’hormone du stress diminue, votre DHEA augmente, votre tension artérielle se régule, etc. Tout ceci passe par le système nerveux autonome qui envoie en permanence au cœur des messages d’alerte ou de repos par le biais de la branche sympathique (l’accélérateur) et de la branche para-sympathique (le frein). Plus souvent vous ressentez des émotions et des sentiments comme la joie, la gratitude, la confiance, le courage, la tendresse, l’émerveillement, le respect, la gaieté, l’amour, etc., plus souvent vous envoyez des messages de bien-être et de santé à votre corps. Une bonne santé mentale et physique à long terme est en grande partie le fruit d’un cumul d’émotions heureuses.

On a coutume de dire : « Les émotions, ça ne se commande pas ! ». Vous, vous prétendez le contraire.

Il est bien certain que nous ne pouvons décider quelles émotions nous allons ressentir face à tel événement ou à telle pensée. En revanche, nous avons la possibilité de choisir nos pensées ! Ca va vous sembler tellement simpliste ce que je vais vous dire que j’ai presque peur que vous partiez en courant ! Vous voulez être joyeux ? Pensez à quelque-chose de joyeux ! Vous n’êtes pas encore parti ? Donc écoutez la suite car c’est la base théorique de ma méthode :

De même que l’évocation d’un souvenir douloureux vous refait vivre l’émotion corporellement et vous attriste, l’évocation d’une situation de tendresse, d’émerveillement ou de confiance suscite en vous les émotions correspondantes. Et c’est ainsi que vous avez le pouvoir de produire presque sur commande des émotions guérisseuses ! A chaque fois que vous suscitez une émotion par une pensée, vous permettez à votre cerveau d’y revenir plus facilement dès que l’occasion se présentera. C’est un peu comme un nouveau chemin que l’on emprunterait chaque matin pour se rendre au travail. Au début, on le fait parce qu’on y pense et puis au bout de quelques jours, l’itinéraire est inscrit dans le cerveau. L’emprunter devient un réflexe.

Avec les émotions qui guérissent, c’est pareil. Si vous vous employez méthodiquement à les développer en pensant à des choses qui vous ouvrent le cœur, et bien, quel que soit votre point de départ, elles deviendront progressivement des traits de plus en plus dominants de votre personnalité. Le cerveau aura tout simplement affecté un plus grands nombre de neurones aux circuits cérébraux responsables des belles émotions ! Et vous constaterez comme les événements de la vie susciteront plus facilement le contentement. C’est l’un des ressorts sur lequel s’appuie mon livre, mais ce n’est pas le seul.

Ma méthode rassemble et synthétise des pratiques connues par différentes traditions spirituelles et par les sciences cognitives. J’y ai ajouté quelques éléments tirés de ma pratique de coach en cohérence cardiaque qui ont été utiles à des personnes face à certaines difficultés comme par exemple un tempérament anxieux, mélancolique ou irritable.

Pouvez-vous résumer votre méthode ?

Dans mon livre, j’utilise deux entrées :

La première consiste à susciter les émotions reconnues comme favorables à la santé en les évoquant à travers un court texte : un témoignage, une histoire, une explication… J’ai représenté chacune d’entre elles par une marguerite dont le cœur est la gratitude, la foi, dans le sens de foi-confiance ou l’amour. Les pétales sont les différentes formes que peut prendre cette émotion dans la vie. Chaque jour, le lecteur est invité à cueillir un pétale, soit par un tirage, soit en ouvrant le livre au hasard, et à s’imprégner de l’émotion guérisseuse pour qu’elle grandisse en lui. Je l’incite à fréquenter ce livre comme un ami de bon conseil et à le consulter chaque fois qu’il en ressent le besoin ou l’envie.

La deuxième entrée est physiologique : c’est la cohérence ou plus précisément la résonance cardiaque, un état particulier du fonctionnement du cœur que l’on suscite par un exercice respiratoire. Il a pour effet de réguler le système nerveux autonome et les centre émotionnels pendant plusieurs heures. La résonance cardiaque est utilisée par de plus en plus de personnes – des méditants aux pilotes de chasse ! – pour améliorer leur état émotionnel…

Le lecteur peut, soit s’imprégner de l’émotion guérisseuse par la lecture, soit réguler ses émotions par la respiration, soit faire les deux à la fois ! S’il cumule les deux, il apporte à son corps un double confort émotionnel ! Le cerveau adore ça et a envie d’y revenir. J’ai écrit ce livre pour aider les gens à reconnaître les belles émotions, à se les rappeler avec bonheur afin de les cultiver et les côtoyer au quotidien.

L’émotion ne serait-elle que physiologique ?

J’aime cette phrase du neurobiologiste Antonio Damasio : « Les émotions se manifestent sur le théâtre du corps, les sentiments sur celui de l’esprit. » Comme ils sont étroitement reliés et forment un processus continu, nous pensons souvent qu’ils sont une seule et même chose. Or les neurosciences ont montré qu’ils ne relèvent pas des mêmes zones cérébrales. L’émotion vient du cerveau limbique. Extérieurement, elle se traduit par les expressions du visage et les mouvements musculaires. Intérieurement, elle influence le rythme cardiaque, le tonus musculaire, les sécrétions hormonales, etc. Le sentiment appartient au domaine de la pensée. Il est relié à l’activité du néocortex et n’a pas de traduction expressive et physiologique… Sauf lorsqu’il se traduit par une émotion.

Que pensez-vous du décodage biologique ?

Le décodage biologique est une découverte majeure qui transforme en profondeur le rapport que nous avons à notre propre corps et aux messages qu’il nous adresse. Je vois une grande complémentarité entre cette science et la résonance cardiaque. Car la difficulté sur laquelle butent souvent le patient et le thérapeute, c’est de passer d’une compréhension néocorticale (par la pensée) du surstress à l’origine de la maladie à une compréhension émotionnelle, corporelle. Avec la c cardiaque, nous rassurons nos centres émotionnels. Imaginez un chaton apeuré par un objet qui vient de tomber avec fracas. Au début, on lui parle doucement et ensuite, on lui met devant les yeux l’objet tout en le caressant gentiment et en lui disant qu’il n’y a pas de danger. Au bout d’un moment, le chat n’a plus peur de l’objet et se met à ronronner. Avec un traumatisme ayant occasionné , on peut faire pareil : créer une bulle de confort émotionnel et revisiter le traumatisme depuis cette bulle. Allumer la chandelle avant de descendre à la cave ! La résonance cardiaque crée cette bulle de confort émotionnel depuis laquelle nous pouvons revisiter nos tourments, récent puis anciens. Le corps et l’esprit, physiologiquement apaisés, comprennent peu à peu que l’objet du stress n’est plus dangereux. La résonance cardiaque est surtout en tant qu’outil d’hygiène émotionnelle quotidienne mais peut très bien entrer dans l’arsenal thérapeutique d’un praticien en décodage biologique.

Vous-même, utilisez-vous cette approche ? Quelle émotion vous fait le plus de bien, a le plus d’effet bénéfique sur vous ?

Oh oui je l’utilise ! Je ne peux plus m’en passer ! Dans l’ensemble, je me rends compte que toutes les émotions qui me donnent le sentiment d’être relié à autrui ou à l’univers me font du bien. Il y a bien sûr le sentiment du partage, celui d’être utile, celui d’être aimé, mais également la reconnaissance, l’émerveillement, la confiance dans mes propres possibilités ou encore en Dieu ou dans l’intelligence de la vie. Et même une certaine forme de tristesse – dans mon cas ce peut être face à la souffrance animale – peut être bénéfique ! Quand nous sommes tristes pour les autres, quelque-chose en nous demeure heureux. Ce paradoxe a été mesuré sur un moine bouddhiste : Par imagerie cérébrale, on a observé que lorsqu’il ressentait de la tristesse et de la compassion face à la souffrance d’un autre être humain, son cerveau témoignait d’un profond état de relaxation. Quand j’ai eu connaissance de cette expérience, cela a été une révélation ! Depuis, je ne rejette plus systématiquement la tristesse. Je m’efforce plutôt de la rendre altruiste, ce qui m’évite de m‘apitoyer sur moi-même. Cette révélation et bien d’autres, c’est ce que j’ai voulu partager au travers de mon livre.

Emmanuel Pascal est coach en cohérence cardiaque diplômé de l’Institut de Médecine Intégrée. En plus de ses consultations, il anime des ateliers et des formations en guérison émotionnelle.

www.aucoeurducorps.com

contact@coherence-cardiaque.com

Partagez Néosanté !