Changer nos habitudes pour guérir (II)

Voici le septième et dernier article de la série consacrée aux trois conditions (la prise de conscience, l’action et la persévérance) à mettre en œuvre pour augmenter nos chances de guérison. Le mois dernier, je vous présentais les cinq premières conditions qui rendent notre persévérance porteuse de résultats : (1) se désidentifier afin de ne pas confondre ce que nous vivons avec ce que nous sommes – (2) poser des actes 100 % sous notre contrôle afin de ne pas faire dépendre notre guérison de la réaction des autres – (3) adopter la politique des petits pas afin de ne pas générer des résistances inconscientes et du découragement – (4) lâcher la pression sur le résultat afin de garder notre attention sur les actes à poser et sur le processus – (5) se méfier des apparences afin de comprendre et de discerner pourquoi nous expérimentons des désagréments lorsque nous mettons en œuvre un changement…

Passons en revue à présent cinq autres conditions favorables à notre guérison, qu’elle soit physique ou psychique…

Condition n° 6 : se donner des moyens de rappel

Comme je le mentionnais dans un article précédent, l’être humain a une capacité extraordinaire d’oublier ce qui est essentiel et important pour lui, surtout quand ça pourrait lui faire du bien ! « L’esprit est fort, mais la chair est faible » rappelait saint Paul ! Dans son langage, ça signifiait que nos intentions de changer, de nous améliorer peuvent être aussi fortes que l’on veut, il n’en reste pas moins vrai que la mise en application concrète, incarnée (d’où la notion de chair) dans le quotidien relève d’une toute autre paire de manches ! C’est la raison pour laquelle nous devons multiplier les moyens qui nous « rappellent à l’ordre », qui nous rappellent l’engagement que nous avons pris vis-à-vis de nous-même pour changer. Or, dans cette série d’articles, vous avez compris qu’un changement véritable ne peut survenir que si la prise de conscience de ce qu’il faut changer se transforme en acte et que cet acte est répété pour qu’il devienne une habitude…
La stratégie pour « tenir » dans la durée, pour que les actes de guérison soient répétés suffisamment longtemps afin qu’on puisse en ressentir les effets, c’est de s’entourer physiquement d’objets et d’éléments qui vont nous soutenir dans notre discipline de vie. Souvent, au début des séminaires de formation que j’anime pendant douze à vingt-quatre mois, j’incite les participants à acheter, fabriquer, confectionner, façonner un objet qui les accompagnera pendant toute la durée de leur parcours de formation. J’appelle cela un objet d’ancrage. La condition, c’est qu’il faut que sa présence se manifeste en permanence dans notre vie, sans que nous y pensions. Ça peut être une petite sculpture qu’on pose sur son bureau, une image, un dessin, une photo qu’on associe spécifiquement aux actes à poser, une tasse spéciale dans laquelle on boit sa tisane, un bijou que l’on porte au cou ou au doigt, un économiseur d’écran ou un fond d’écran qui surgit régulièrement sur notre ordinateur… Pour que ça marche, il est impératif que cet objet soit nouveau et qu’il soit associé exclusivement et de manière univoque au processus de changement que l’on veut mettre en place ! Ainsi, chaque fois que nous serons en contact avec cet objet, nous ne pourrons penser qu’à notre engagement à poser des actes dans la durée.

Condition n° 7 : se trouver du soutien

Pour la même raison que celle évoquée ci-dessus (la faiblesse de la chair), il est important de s’entourer de personnes qui acceptent de nous soutenir, surtout lorsque nous connaîtrons les inévitables phases de découragement. En effet, au cœur du processus de changement, il n’est pas rare que nous nous sentions très seul sur notre chemin. Pour plusieurs raisons : tout d’abord, par essence, tout chemin initiatique est un processus solitaire. Car personne d’autre que nous ne peut affronter nos propres démons intérieurs, nos résistances, nos peurs, nos ombres. Ensuite, c’est à nous à poser les actes qui donneront à notre vie une direction plus respectueuse de nos besoins et de notre équilibre. Personne ne peut le faire à notre place. Enfin, les épreuves que nous réserve ce parcours du combattant sont, d’une certaine manière, incommunicables à autrui, comme si les mots étaient trop faibles pour décrire ce que nous vivons intérieurement. La stratégie consiste donc à demander explicitement du soutien. Il ne s’agit pas d’attendre que notre entourage comprenne que nous avons besoin d’encouragements et de conseils. Il s’agit, une fois de plus, de prendre la responsabilité de notre réalité et d’aller au devant de ceux qui peuvent nous faire du bien. Ça peut être un coach ou un thérapeute professionnel, ça peut être un ami ou un partenaire de vie, ça peut être aussi une personne qui entreprend la même démarche que nous ! Bien sûr, aucune solution n’est parfaite. Mais personnellement, je préfère de loin être accompagné et soutenu imparfaitement que d’être laissé à moi-même, lorsque je traverse des moments difficiles sur mon chemin… Surtout, si l’enjeu de ce chemin est de guérir d’une maladie grave ou d’une pathologie profonde !

Condition n° 8 : évaluer notre progression

Curieusement, lorsque nous mettons en place des actes pour changer notre qualité de vie de manière durable et observable, nous sommes très vite frappés d’amnésie quant à l’état dans lequel nous étions quelques semaines ou quelques mois auparavant. Du coup, nous avons la sensation (souvent fausse) de faire du sur-place et de ne pas avancer. Avec comme conséquence, beaucoup de découragement, de défaitisme et d’autodévalorisation… En choisissant comme stratégie l’évaluation régulière de notre progression, nous expérimentons quatre grands avantages. Le premier, c’est qu’en jetant un coup d’œil dans le rétroviseur régulièrement, nous prenons conscience de tout le chemin que nous avons parcouru. Ce qui nous permet automatiquement d’évaluer les progrès accomplis. Le deuxième avantage, c’est que chaque évaluation nous permet de corriger nos actions, de les améliorer, de les optimiser, afin que le changement espéré soit encore plus présent dans notre vie. Le troisième avantage, c’est que ces moments d’évaluation nous permettent de rester motivé lorsque, face à l’ampleur de la tâche, le découragement nous tenaille ! Le dernier avantage, c’est que cette pratique évaluative régulière nous donne une occasion en or de nous refixer à chaque fois des nouveaux objectifs de changement. Ainsi, naturellement, nous mettons en œuvre la condition numéro 3 que je vous avais présentée la fois dernière : « adopter la politique des petits pas ».

Condition n° 9 : célébrer chaque succès

Une fois notre évaluation terminée, nous sommes capable de poser un regard plus objectif sur le chemin que nous avons déjà parcouru, même si celui qui nous attend est dix ou cent fois plus long ou plus exigeant ! C’est une autre manière de garder à un niveau très élevé notre motivation à changer. En faisant cela régulièrement, on cultive plusieurs éléments qui ne peuvent qu’être favorables à notre processus de guérison. Tout d’abord, nous nous donnons de la reconnaissance, qui est un des besoins fondamentaux de tout être humain. Nous augmentons l’image positive que nous avons de nous-même. Avec comme conséquence que la confiance dans nos capacités et dans nos compétences augmente ! Au fur et à mesure que cette confiance grandit, nous osons davantage poser les actes suivants, avec plus d’assurance et plus d’efficacité. Ce qui nous amène à accumuler des succès de plus en plus nombreux. Qu’on peut à nouveau célébrer dignement ! Ainsi, en procédant comme cela, nous engendrons un cercle vertueux, une spirale du succès qui nous porte et nous soutient de plus en plus dans notre quête de la guérison.
Concrètement, pour célébrer un succès, nul besoin d’ouvrir une bouteille de Champagne à chaque fois, ni d’organiser un banquet somptueux avec le ban et l’arrière-ban de nos relations ! L’essentiel réside dans l’intention. S’offrir un bon bain chaud, s’acheter une belle rose que l’on pose devant soi, se cuisiner son plat préféré, faire une balade à vélo, prendre une après-midi pour lire un bon roman, tout cela peut être choisi en conscience comme autant de manières de célébrer et de se féliciter des progrès accomplis !

Condition n° 10 : se remettre en question en permanence

Lorsque la réussite est au rendez-vous, lorsque la persévérance a transformé nos actes en une habitude positive et salutaire, lorsque notre état de santé mentale ou physique s’améliore effectivement, un dernier danger, plus insidieux, plus sournois, nous guette et nous menace : celui de se croire arrivé. Tel est le paradoxe de tout processus de changement : les actes qui nous ont permis de retrouver l’équilibre peuvent devenir, tôt ou tard, ceux qu’il faudra nécessairement abandonner si l’on veut rester dans un équilibre dynamique à long terme. Car la Vie évolue en permanence et les conditions qui garantissent notre équilibre aujourd’hui ne sont peut-être pas celles dont nous aurons besoin pour être en équilibre demain. Si donc, nous décidons de reproduire indéfiniment les actions qui nous ont permis de guérir, nous risquons de créer un jour un autre déséquilibre qui provoquera une nouvelle maladie…
La stratégie à mettre en place est celle du doute systématique, si cher à René Descartes. Personnellement, je traduis cette philosophie du doute systématique par la phrase suivante : « avoir des convictions fortes et affirmées, mais jamais aucune certitude… » De la sorte, la guérison ne sera jamais un état et un résultat à rechercher, mais plutôt une dynamique perpétuelle en quête d’un équilibre toujours provisoire.

Jean-Jacques Crèvecoeur

Partagez Néosanté !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire